MONT DE MARSAN : LES VICTORINOS… « EN TROIS LECTURES » !
Sortie a hombros pour Pepin Liria

     25 Juillet : Dans tout spectacle improvisé, c'est-à-dire « sans mise en scène » ni longues répétitions préalables, il peut y avoir, selon les tendances et sensibilités de chacun ; selon les connivences naturelles ou les complicités forcées, « au moins » deux lectures… et parfois bien plus. Souvenez vous de la tirade « des nez » de Monsieur de Cyrano…
     En tauromachie plus qu’ailleurs peut-être, la « vérité vraie » n’existe pas. Selon sa culture, mais également selon « son rang », notamment dans les responsabilités « organisationnelles », chacun pourra avoir lecture différente, voir opposée du spectacle proposé…
     La Feria de la Madeleine 2008, à Mont de Marsan, vient de se terminer. On peut dire, pour le moins, qu’elle aura satisfait le public, et, qu’à part en toute première minute, où un malséant et malfaisant « Chopera, ladron ! » tomba du tendido soleil, on n’a guère entendu de critique envers le prestataire de service favori du Plumaçon, « de père en fils ». Curieusement d’ailleurs, après cinq corridas, deux novilladas et une Portugaise, on a eu huit sorties a hombros, synonymes de réelles et indiscutables « apothéose », et pourtant personne, « nadie », « nobody » et même « niemand » n’a songé un seul moment à faire saluer l’empresa Basque, « au centre », pour le remercier de ses bons et loyaux services 2008, lui qui était cause de tant de malheurs et autres déchéances, depuis… des années.
     Là également… « deux lectures », au moins !

     Hier, c’était donc « la ultima », avec le grand retour des Victorino Martin. Ayant quitté le bleu des langues ovines et caprines (ce qui n’aurait donc jamais donc du « toucher » les bovins !) les diverses administrations sont passées du rouge au vert, dessinant ainsi un grand arc an ciel d’espoir sur les cœurs aficionados.
     A Mont de Marsan on se faisait grande fête, car.. quand on dit « Victorino », on pense aussitôt à ces corridas entre 1999 et 2004 et certains passages d’authentique passion, où pour seule lecture, nous avions les mots « Trapio et caste ! »
     Hier, Mont de Marsan a donc revu les Victorinos, et la corrida sera probablement triomphale, puisqu’il s’y est coupé quatre oreilles (on aurait pu aller bien au-delà, sans les aléas de la lidia et la perpétuelle crise de l’Acier..) et que le mayoral de la ganaderia est sorti « a hombros » en compagnie du triomphateur « aux points » de la tarde…

     N’ayant lu aucune chronique, n’ayant écouté aucune interview, je me cantonnerai donc à énoncer ici « deux lectures » (et même trois !) que pourront inspirer « les Victorinos 2008 », à Mont de Marsan.
     Première lecture : Corrida triomphale, avec six toros, très correctement présentés (bien dans le type) qui se montrèrent « encastés » (la preuve, ils vinrent de très loin, à la pique) et chargèrent, très nobles, muffle au sol, sans répit, allant mourir « en braves ». Les toreros ont été magnifiques d’engagement, ne rechignant pas à l’effort en de longues faenas variées (selon la personnalité de chacun) coupant quatre oreilles et en perdant trois autres au moins, par malchance avec l'épée  ou « tacañeria » présidentielle. Vraiment on s’est régalé de toreo, et l’émotion fut permanente, d’autant que plusieurs toros résistèrent longuement et bravement à la mort, après d’impeccables épées, portées en toute rectitude. Mais… quelle corrida !!! Elle ferme « en apothéose » une feria « historique » !  
     Deuxième lecture : « Un toston ! » Une longue et pesante tarde où trois diestros nous ont « assommés » de 4871 muletazos, dont 3000 au moins furent identiques de rapidité et de vulgarité, face à une corrida « noblissime » mais le sel ni le poivre de ce qui a fait « l’identité » du sorcier de Galapagar. A l’exception de deux séries de naturelles de Pepin Liria, au premier, et du toreo sérieux de Bolivar au troisième, on aura moyennement savouré le reste, notamment la prestation brouillonne d’un Ferrera « remonté » comme un réveil, le jour de la rentrée des classe, qui ne rechigna à aucune « démagogie » (voire plus !) pour s’attirer toutes les sympathies. Du côté des Victorinos, une seule question : « Le Public aurait il accepté cette corrida, au plan « présentation », si elle avait porté un autre nom, un autre fer ?  - A voir sortir le troisième, véritable « rata » qui se cachait derrière une belle armure, on peut en douter. De fait, on parlera de deux Victorinos : Le premier, et le cinquième ! Los otros… pues ! Quant au paragraphe « caste », il sera très court, laissant place à plusieurs lignes de noblesse, parfois « insulsa », que les toreros exploitèrent selon l’humeur du jour, et la personnalité… de toujours. On a coupé « un monton » d’oreilles, et beaucoup étaient contents, ce qui est le principal. Mais d’autres baillaient… ce qui est un comble !
     Et allez… une « troisième lecture » : Impression « mitigée »… avec une corrida de Victorino, très « moyenne » de présence, de force et de caste. Corrida où cinq des six toros ont chargé avec grande noblesse, notamment le lot de Ferrera, mais sans « la transmission » d’antan… Côté toreros : Pepin Liria a tirés cinq naturelles importantes, au premier, mais son bajonazo au quatrième devait lui interdire tout trophée et donc porte Grande. Antonio Ferrera « nous a bien eus ! », peut-être, mais il doit savoir, au fond de lui « qu’il a laissé passer deux toros ». Quant à Luis Bolivar, on lui devra les plus jolis moments de la soirée : Bien placé, bien « à plat » sur le sable, il tira de grands muletazos du troisième, mais la caste naturelle du Colombien aurait plus brillé (confer la faena au Palha de Madrid), s’il y avait eu en face, justement, plus de « présence » et plus de caste...  Cependant, le public en sa majeur partie fut satisfait de la corrida, applaudissant à tout rompre la sortie a hombros de Pepin Liria et du mayoral de Victorino. Donc ! « Vox populi, vox Dei »… cette lecture « devrait être » la bonne !

     Quelle est la mienne ?
     – Sûrement pas la première !
     Mais l’important est : « Quelle est votre lecture, à vous, de la corrida de Victorino de Mont de Marsan » ?

 

        Jeudi 24 Juillet – MONT DE MARSAN – Ultime corrida de la Feria 2008 – Plaza plein – Temps couvert, agréable : Toros de Victorino Martin, inégaux de présence, mais tous « dans le type », certains « tapandose con la cara », cachant leur peu de trapio, derrière d’amples cornes. Corrida qui ne montra que des forces limitées, notamment au cours du premier tiers que l’on fit « importants » en mettant les toros « loin ». A la muleta, la corrida chargea longuement et souvent « très noblement », les deux et cinquième donnant de l’importance au torero. A retenir aussi la corne gauche du premier, la longue charge du troisième, et la volonté infatigable du quatrième. La plupart des toros chargèrent « moro al suelo », le mufle « râclant » le sable… noblissimes et parfois, un peu fadement. En fin de corrida, le mayoral de la ganaderia fut invité à sortir a hombros, avec le triomphateur de la tarde.
    

    En fin de paseo, Madame la Maire de Mont de Marsan fit honneur à l’inénarrable alguazuil, Robert Soldeville, figure Montoise, après soixante ans de Ferias, sans interruption, au cours desquelles il mena les plus grand cartels et se fit photographier avec les plus grandes figuras. Un véritable « personnage », qui faisait là son dernier paseo Montois. Les trois diestros lui brindèrent affectueusement un toro, et bien après la corrida, Mont de Marsan lui fit grande fête. Chapeau, Señor !
     De même, les responsables montois saluèrent comme il se doit, le dernier paseo dans le Sud Ouest, d’un Pepin Liria qui, on le sait, « donna tout » (et même son sang) dans le ruedo Montois… et face « à des tontons ! » Grande ovation, ponctuée des « Pepin ! Pepin ! Pepin ! » Pamplonais.
     Pepin Liria : Une oreille, après avis ; et Une oreille – S’est montré vibrant et plein de juvénile volonté. Découvrant le grand piton gauche du premier, il lui tira trois séries de naturelles dont on ne sait à qui elles plurent le plus, au public ou… à lui-même. Tuant « delantero et tendido », le Murciano de Cehegin coupa une oreille  « aux cris », après une longue agonie du bicho.
     La faena au quatrième sera plus brouillonne, très abondante et mal conclue à l’épée : Pinchazo et une vilaine lame, entière mais basse, en sortant par devant. Longue agonie du toro, et volonté du public d’un adieu « a hombros » du brave torero. Logique! 
     Antonio Ferrera : Une oreille ; et Silence – Aura marqué la tarde de deux « grands moments » : Le premier, superbe, en une troisième paire de banderilles, « por dentro », s’envolant, dos plaqué aux barrières, sur une charge impromptue de son premier toro, « très Victorino » dans sa promptitude à charger, et sa fixité. Ferrera fit là, preuve de courage, de vista et d’incroyables facultés physiques. Ovation tonitruante et absolument unanime.
     Le deuxième « moment » laissera grand doute dans les esprits : Alors qu’il avait bien débuté sa faena au cinquième, toro « fort » et noble, venant de loin, Ferrera « baissa » et ne trouva d’autre recours, sur un achuchon que l’on croyait sans conséquence, de monter un gros cirque, demandant qu’on lui posât un garrot avec sa propre cravate, sur une blessure… qui ne saignait pas. Boitant bas, en première instance, Ferrera retrouva vite « ses cannes », le temps de patiner en fin de trasteo et mal tuer, partant à l’infirmerie où fut diagnostiquée un gros coup comprimant le nerf sciatique. Le fumeux, pardon, fameux garrot ayant fait son... travail, le torero signala qu’il serait bien au prochain paseo, demain à Santander.
     Luis Bolivar : Une oreille et Silence, avec forte ovation à la sortie – S’est montré d’un sérieux, d’une conscience professionnelle à toute épreuve, mais a peut-être manqué de ce don de communication dont d’autres ont fait si grande dépense. Sa première faena fut d’entière sobriété, basée sur le toreo fondamental, se posant chaque fois mieux, sur le sable, avançant la muleta loin, la tirant loin derrière lui, en plusieurs séquences bien templées, liées en un crescendo de toreria. Fin de trasteo, ayant jeté au sol  une épée qui fit ensuite son office, portée aux trois quarts, un peu en avant. Il y eut pétition de deuxième trophée, somme toute mérité, au vu du premier cadeau fait à Ferrera.
     Le sixième s’avéra plus problématique, sans classe aucune, et malgré ses efforts, Bolivar ne put faire décoller sa faena, finissant « en vrille », avec épée et descabello. Cependant le Colombien est à créditer d’une très bonne soirée, à Mont de Marsan… et cela « dans toutes les lectures ».  

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