SPECIAL " FERIA DE DAX 2008"
 

DAX: « UN COUP TU LE VOIS, UN COUP… ! »
Grande faena de Talavante, oubliée…
Le Cid « fonctionne » bien !

     14 Août : « Un coup tu l’vois… un coup tu l’vois plus ! » C’est un peu ce que l’on retiendra d’un Alejandro Talavante qui aura été, ce jour, « bien mieux » qu’on ne le pensera, devant le troisième de la tarde, et à l’inverse, « bien mal », devant le dernier de cette corrida d'ouverture 2008.
     En fait, toute la tarde fut un peu du même acabit, genre « un coup tu l’vois… un coup tu l’vois plus ! »
     Tout d’abord les toros : un lot de Mayalde qui, cette fois, ne restera pas dans les annales. Toros sortant « sin fijeza », galopant en tous sens ; « pegajosos », collant au capes ; souvent sans forces, fusant sur les piqueros pour des puyazos réduits. A la muleta de même : Trois charges « très aimables », et tout à coup… la vacherie, en dessous de la ceinture. Toros « con mobilidad », avec de la mobilité, mais en général « sans sel », ne transmettant que peu de danger. Pourtant, sous cette apparente noblesse, une corrida devant laquelle il était probablement difficile « de estar a gusto », de se relâcher vraiment.
     Ensuite, les hommes...

     « Un coup, tu l’vois… Curro Diaz ! » 
     Le Linarense toréa souvent « très joli », mais « ne pesa » que rarement sur ses toros. Certes il baissa la main, mais ses muuletazos furent souvent courts et rapides. Ce peu de dominio, compensé par de magnifiques adornos, eut pour conséquences quelques « sustos », notamment sur la corne droite, périlleuse, du premier ; et un désarmé, au quatrième, qui mit toute la faena par terre. N’ayant rien résolu devant ce toro, le torero attaqua « sans confiance » à l’épée, et, sur la troisième entrée, prit le frontal en pleine poitrine. Recherché et repris, au sol, le diestro fit une dangereuse « pirouette » autour du piton, et doit bien à quelque vierge Andalouse, le fait de s’en sortir sans mal. Mais au bilan, Curro Diaz a perdu la seule opportunité de dire qu'à part à Dax, on se souvenait bien peu de ses excellences, en 2007.

     « Un coup tu l’vois… le Cid ! »
     Excusable, devant son premier, dont les deux cornes savaient un peu de Latin et de Greco-Gascon, le grand Manuel de Salteras aurait du couper les deux oreilles du cinquième, toro noble, mais distrait. Le Cid débuta fort, plein centre, mais « fit des passes » plus qu’il ne toréa. Trois redondos « redondos », main basse, « toréés à fond », liés à un joli cambio et gros pecho, en milieu de faena, prouvèrent bien que… s’il avait vraiment voulu être « en Cid »… Alla él ! Faisant plus dans la quantité que la vraie qualité, le Cid « se paso de faena », et tua spectaculairement, mais… de côté.

     « Un coup tu l’vois… Talavante ! »
     Dax ne sait pas la chance qu’elle a eue… car bien souvent, Talavante, c’est celui « du sixième », qui ennuie autant qu’il semble s’ennuyer. Mais attention… peut-être « conditionnée » par ce qu’elle sait, ce qu’on lui a dit, ou ce qu’elle a vu, en certaines télévisées, Dax n’a peut-être pas perçu, à son niveau, la faena de Talavante, au noble troisième.
     Certes ce fut un long monologue, une longue litanie de passes, surtout dans la première partie… Mais, Señores ! nous devons reconnaître le temple et le lié, en séries « de 6 ou 7 », tant par derechazos allurés que naturelles, « jambe avancée » ou  « pieds joints ». D’ailleurs, le public ne s’y trompa point, qui soupira d’aise, en plusieurs passages, sur chaque main.
     Puis il y eut « la deuxième partie », complète et très torera : le « tres en uno » que le diestro « compliqua » par un adorno supplémentaire ; les manoletinas finales, avec le cambio dans le dos ; les trincheras et les firmas… Pour le coup… « on les a vues ! ».
     A l’heure de l’épée, Talavante mit une lame qui, « pour lui », était tout à fait recevable, car on sait à quel point il est mauvais tueur. Aussi, alors que l’on se disait que Talavante venait « d’entrer en France », on fut un peu surpris d’une pétition bien chiche, alors qu’en maint lieu d’Espagne, il coupait deux oreilles. Peut-être même, à Séville ou même Madrid…
     A Dax, imaginons que le Juli fasse la même faena… corta dos y rabo ! A que si ?
     Le problème, il est double ! Un, Dax a essayé de retrouver en Talavante, le double de Jose Tomas, dont on lui parlait tant. Pues no ! Et deux : Ce garçon manque tellement « de chaleur humaine », d’expression, de sourire « vrai », que l’on a de grandes difficultés à accrocher, même quand il est « bien », ou même « très bien »… comme hier à Dax.
     Mais au fond, tout cela est peut-être de notre faute, à nous les « journaleux », qui avons passé quelques mois à souligner à gros traits « le regard vide » du jeune Extremeño. Alors… battons notre coulpe, tous ensemble, car hier à Dax, « on a vu Talavante »… Du moins à un toro ! Parce qu’au sixième, ce fut « … un coup tu l’vois plus ! »

     Et puis « Un coup tu l’vois… et le coup prochain, aussi !!! »
     Que la plaza était belle, hier, remplie jusqu’au toit ! Que les clarines sonnaient bien, ensemble, « juste ! » et « con aroma ! » Et que Dax fit bien les choses, au moment de « défendre ensemble notre tradition Taurine ! » La ronde des gamins, au centre du ruedo, tandis que les gradins chantaient « l’hymne de chez nous ! », en levant bien haut les quelques mots qui disent notre identité culturelle, simplement et sans provocation aucune… cela avait « une certaine gueule ! » Que bueno!
     Première corrida de Feria, qui aura un peu laissé l’aficion, sur sa faim… du fait de toros « déroutants » et de toreros qui n’ont peut-être laissé « qu’entrevoir ! »
     Que voulez vous… c’est rare de « tout voir » d’un coup… Vu ?

   Mercredi 13 Août – DAX – 1ère de Feria – No hay billetes – Beau temps revenu, agréable : Six toros du Conde de Mayalde, de présence inégale mais « allant a mas », le premier  « de peu de cage », mais très armé. Corrida « déroutante », les toros sortant « abantos », distraits, ne se laissant pas toréer de cape, collant aux hommes, « pegajosos » ; fusant aux chevaux, sans mise en suerte (sauf le Cid, au 5ème), mais montrant vite la limite de leurs forces et de leur bravoure. Au deuxième tiers, coupant le voyage ou « gagnant un temps » aux banderilleros (le Boni devant saluer, pour son autorité, devant le cinquième). Et à la muleta : «de boîtes à surprises », notamment les 1, 2 et 4èmes, mêlant le « noble, très mobile », au « sournois, sachant mettre la corne.. ». Un toro de belle noblesse, le 3, mis encore en confiance par la muleta « douce mais ferme » de Talavante. Un autre noble, quoique très distrait, le 5ème, que le Cid ne parvint pas « à captiver » tout à fait. Le dernier ne fut pas un ogre, mais « il ne dit rien »…
     Avant la corrida, joli geste de « Dax, toute entière » en revendication de notre tradition et Culture Taurine. Au paseo, retour discret et « con clase » de Yannick Boutet, l’alguazil de toujours.

       Curro Diaz : Ovation, au tiers ; et Silence – N’a pas totalement convaincu… peut-être parce qu’il a besoin de toros « plus profonds », plus « templados ». Là, il toucha un premier « moustique », petit de corps mais méchant de cornes, dont les idées, d’entrée, frôlaient « le clair-obscur ». On pensait l’affaire en bonne voie, dès la jolie demi véronique de réception, mais à la sortie d’un puyazo, la corne droite sonna une méchante alerte. En début de faena, « andando bien al toro », Curro Diaz mit l’eau à toutes les bouches, mais le toro vint, « rebrincadito » parce que faible, en des charges inégales et parfois même « incertaines ». La faena fut « légère », sans profondeur, pourtant illuminée beaux enchaînements ornementaux, avant de basculer, en entrant fort, une lame basse qui provoqua vomito et mort immédiate. Dax récompensa avec justice.
     Le quatrième, de belle prestance, fit de vilaines choses au premier tiers ( achuchon au matador, dans la demie ; et le subalterne, qui faillit bien se faire écharper). Curro Diaz débuta bien sa faena, même s’il n’appuya aucun de ses muletazos, mais « se perdit un peu », après un désarmé inopportun. Ne pouvant « remonter » la faena, le matador partit à l’attaque, sans confiance et, sur la troisième lame, courte, le toro le percuta, au pecho, l’envoya au sol où il le reprit pour une vilaine voltereta, heureusement sans grande conséquence. Secoué, le torero finit un peu en débandade.
     « El Cid » : Silence et Une oreille – Tomba sur un premier toro pegajoso, collant au capote, l’obligeant à sortir vers le centre. Toro faible mais un peu « hijo p…», qui avait un méchant hachazo droitier, en fin de passe, et n’allait pas mieux, sur la gauche, comme le démontra le Sévillan, en une faena où « il tira des lignes », tandis que le toro alternait « l’andarin », marchant beaucoup, et « l’escarbando », arrêté, grattant le sable. Le Cid « douta un peu », mais montra qui « il aurait pu être.. », en une courte série droitière, main basse, où il s’imposa vraiment. Estocade « ladeada » et « muy trasera », très en arrière, et tout le monde qui boude.
     Le cinquième sera un toro noble mais très distrait, que le Cid entreprendra, au centre, le sourire aux lèvres, comme « jugando al toro ». Il y aura une statuaire, un trincherazo et une passe du mépris (de desprecio) de toute beauté. Pourtant, alors que l’on s’attendait à un faenon, intense et profond, ce fut sur un océan de légèreté que nous entraîna le muletero, liant certes les passes, mais alternant les inégalités, sur deux mains. Faena, couvrant beaucoup de terrain, suscitant grand espoir  sur trois derechazos, main très basse, lié à un joli cambio et au pecho final. Faena longue, trop longue, finie en terrain de soleil, par un desplante rageur, chaleco ouvert, pecho offert à la corne. Le Cid prépara soigneusement une lame entière, bien poussée, mais qui alla de côté. Faena « à deux doigts de deux oreilles… » à laquelle il manqua un peu plus de profondeur et « d’unité de lieu ».
     Alejandro Talavante : Une oreille « forte » après un avis ; et Silence – Ne put placer qu’un de ses classiques delantales, à la réception du troisième Mayalde, castaño, bas, qui sortit fort et « fusa » sur le piquero. Cependant, le matador y vit immédiate qualité et, après brindis à tous, se mit à lier les passes comme on enfile des perles. Dans un silence surpris mais quand même de plus en plus admiratif, Talavante enchaîna les séries de droitières, par paquets de six ou huit muletazos, templés, limpios, mais un peu fades d’expression. A gauche, l’intensité monta d’un cran et la plaza finit par « remuer » sur deux ou trois trouvailles, comme un « tres en uno » amélioré d’un adorno personnel, ou les manoletinas finales, sans sourciller, agrémentées d’un cambio dans le dos, très propre. Faena « a mas », très templée, close de plusieurs adornos de classe, auxquels ni la public ni le torero (ce qui est plus grave) ne donnèrent assez d’importance. Faena claire et « très torera », close d’une lame un peu tendida qui n’eut pas d’effet immédiat, raison pour laquelle, peut-être, on ne demanda aucun double trophée. Mais ce fut « la » faena du jour… et de beaucoup d’autres.
     Devant le sixième, on retrouva le Talavante « plus obscur », plus hésitant, plus « fermé », plus fade… autant que l’était un toro sans classe aucune, estoqué « a une tiempo », d’un trois quarts de lame atravesado et en arrière.
     Ce 13 Août, Alejandro Talavante a bien failli « entrer en France », mais hélas, ce fut « Un coup tu l’vois ! Un coup tu l’vois plus ! » Et ça… 

 

DAX : « FALTO SENSIBILIDAD ! »
Qui a volé « La Porte » ?
Corrida « muy guapa » de Bañuelos.
Mais…

     15 Août: « Falto sensibilidad! »
     Il a manqué « de la sensibilité », hier à Dax… et l’on a volé « la Porte Grande » à un torero. Et ça… c’est pas bien ! C’est encore pire que la concéder à un autre qui ne la mérite pas…
     Si l’on n’est pas capable de reconnaître la vérité d’une faena ou d’une estocade, ni la sincérité « totale » d’un  torero, qu’il soit « figura » ou segundon, qu’il soit novillero ou même becerrista, alors c’est que quelque chose ne va pas !
     On ne marche pas « qu’avec la raison » ! On marche aussi « avec le cœur… et les tripes ! ». Alors, si au cœur s’ajoute « un peu de raison… » ou de « savoir », on se rend compte de ce qui vient de se passer, on sort son mouchoir, et on se lève tous, bien plus fort que pour « Danette »…
     Sinon… « es que falto sensibilidad » !  C'est-à-dire… Aficion ! Autrement dit, le « savoir » et le « ressentir » !
     Et vous, Monsieur du Palco… probablement aviez vous envie de la concéder, cette oreille… mais vous avez passé votre temps à compter les mouchoirs et donc, « règlement en main », vous n’avez pas accordé le trophée que méritait ô combien, un garçon qui s’était joué la vie, « tout à gauche », devant un toraco d’importance, et qui avait tué, « atracandose de toro », restant suspendu au piton l’espace d’un interminable instant…
     « Falto sensibilidad ! Monsieur de Mont de Marsan ! » Si vous n’êtes pas capable de laisser un instant votre calculette de côté, et « ajouter » deux cents de vos blancs mouchoirs aux trois mille et quelques (c’est vous qui avez le chiffre exact !) qui vous demandaient cette oreille, premier « passeport » pour la Puerta Grande… c’est que vous avez manqué de sensibilité… et d’Aficion ! Parce que, vous saviez bien, vous, que le toro était « amorcillado », et que l’on ne pouvait le descabeller… Grande partie du public devait le savoir aussi, qui devait imposer silence à quelques ignares, et demander le trophée… malgré tout, malgré ce temps qui passe, malgré le douloureux spectacle de cette bête qui tarde, tarde, tarde… à tomber.
     Falto sensibilidad ! O, vous n’avez pas douter à envoyer un avis, et nul ne vous le reprochera… Mais vous auriez pu également « faire justice », monsieur le Président…

     « Que paso ? »  - Que s’est il donc passé ?
     – Simplement qu’après une faena « de vérité », dont la majeur partie se fit « sur main gauche » et « à fond », le tout devant un toro « guapisimo » et très armé de Bañuelos, le jeune Colombien Luis Bolivar entra une première fois à matar, pour un pinchazo « vrai », extrêmement violent. Et sur la deuxième entrée, « atracandose de toro », le torero se fit accrocher par le piton, au niveau du chaleco, restant un long instant suspendu au bout de la corne. Estocade « totale », comme on voudrait en voir beaucoup en ces grandes ferias où l’on coupe des oreilles à foison, à grands coups de « julipies » !
     Et là, problème ! Mais problème « connu » ! Le toro « se amorcillo, bebiendose la sangre ! ». Pour une raison que seule expliquerait un examen poussé, post mortem, le toro resta debout, et lutta longuement, tête à mi hauteur, immobile et « se ramassant sur lui-même »… Impossible de le faire bouger, pour une nouvelle épée ; ou de lui baisser la tête, pour le descabello. C’est très désagréable, mais malheureusement, cela arrive parfois.
     Alors bien sûr, certains s’offusqueront, par logique ignorance ; d’autres diront « Si le toro ne tombe pas, c’est que l’estocade était « imparfaite »… Pas vrai, monsieur du Palco ?  - Pues no ! On a vu de grands coups d’épée, qui ont eu ces conséquences.. et l’on en verra encore !
     Que se passa t’il, alors ?
     – Au bout d’un long moment, tandis que quelques protestations fusaient, le toro s’écroula, et le jeune diestro salua, conscient de sa faena, de son estocade « à pile ou face », et de son triomphe… Mais là ! Surprise ! Le public ne « poussa » aucune pétition majoritaire et sans appel. On demanda l’oreille, avec plus de cris que de mouchoirs… Mais le président, lui, « ne compte que les mouchoirs ». Et, règlement en main, on ne peut le lui reprocher ! C’est alors que doit entrer en compte « la sensibilidad » !
     Hier à Dax, le président n’a pas mis les deux cents mouchoirs qui manquaient. A Mont de Marsan, il y a peu, il me semble qu’un président en rajouta… deux mille !!! A que si ?
     Voilà donc pourquoi et comment Luis Bolivar ne coupa point une énorme oreille, coupée « toreando y matando, muy de verdad », en toréant et en estoquant, avec grande sincérité, un toro « important » de Bañuelos. Et voilà pourquoi le Colombien, qui coupa au quatrième une oreille « d’émotion et de courage », ne sortit il pas a hombros, « por la Puerta Grande ». Tout cela parce que… « falto sensibilidad ».

     Corrida « importante » d’Antonio Bañuelos, hier à Dax. Corrida « con trapio y pitones », très sérieuse de présence et très armée. Corrida noble, parfois encastée, à laquelle il manqua un peu de force et de bravoure, au premier tiers. Avec « un petit plus », de tels toros devaient « volatiliser » les piqueros. Ils ne le firent pas, restant relativement discrets, pour « remonter » ensuite, dès le deuxième tiers.
     Deux éléments extérieurs ont en partie gâché la corrida :
     Un: le fait que le troisième toro se soit cassé la corne gauche dans le peto, « annula » totalement la présentation à Dax du jeune Mexicain Joselito Adame, d’autant qu’il essaya de le toréer, y compris sur la corne infirme. A ce sujet, on notera que la corne se cassa, en sa moitié, et que « quedo seco el piton », c'est-à-dire, qu’il ne saigna pas… Ce qui n’est pas normal ! (Un peu comme pour le toro de Castella, à Pamplona). Bañuelos utilise t’il « les fundas », et si oui… pense t’on que le piton « puisse vivre », ainsi emmaillotées de résine ?  - La question est posée… Toujours est-il que cet incident provoqua le doute en de nombreux esprits, d’autant que certains demandèrent le remplacement du toro. Là également, « règlement en main », le président refusa. Triste, mais logique...
     L’autre mauvais coup du Destin, ce fut la pluie, à partir du cinquième ! Et là, on se doute bien que les choses ne sont plus les mêmes. Daniel Luque vit comment l’on ne tenait guère compte de sa faena au cinquième toro de Bañuelos, mais c’est Joselito Adame qui fut peut-être le plus défavorisé, dans la mesure où, face à un toro noble mais très encasté, violent et prêt à la bagarre, le jeune Mexicain n’avait plus tous ses appuis… Mais au fond, peut-être en vaut il mieux ainsi, car il semble qu’Adame soit très friand de demi passes et de recortes, affichant un dynamisme cachant mal certains lacunes, en particulier d’aguante.

     Cet aguante, cette capacité physique et mentale « d’attendre » et « de supporter » la charge du toro, surtout s’il était armé comme tous, hier, Luis Bolivar l’a eu. Avec un courage à épreuve de plus gros boulet de canon, le Colombien « aguanta » formidablement, la grosse charge du premier. Et tout sur main gauche, s’il vous plaît !!! Pero. ?.. falto sensibilidad.
     Devant le quatrième, peut-être pas assez piqué, il faillit se faire couper en deux dans la pedresina d’ouverture, mais là également… « aguanta » formidablement. Comme il supporta les conséquences d’une terrible voltereta, avec grosse chute sur la tête et longue « recherche » au sol… Terribles moments d’anxiété, et probable « raideur », au niveau des cervicales (On verra demain !)  Mais après deux secondes de douleur, le torero revint, et « aguanta » de nouveau…
     Vaillant, le Colombien ! Droit dans la ligne de Rincon, le jour de « Bastonito ».  Cette fois, le public demanda une oreille, malgré le bajonazo, peut-être pour demander pardon !!! Hier en plaza de Dax, Bolivar fut « un géant »….

     Malheureusement, on n’en dira pas autant d’un Daniel Luque, excellent au capote, mais qui ne sut pas, ou ne put pas, donner « le grand pas », avec la muleta. Il étouffa son premier, que l’on vit excellent, en un grand début de faena. Et sous la pluie, il toréa longuement le cinquième, alors le public essayait de se protéger.
     Avec un peu plus de psychologie et de métier, le jeune Sévillan aurait pu viser une faena courte, très intense… il préféra « le long » et le « demi teinte ». Ainsi s’étonna t’il de ne rien couper… En cela il fit une erreur, car s’il avait toréé de muleta avec autant « de sensibilidad » qu’au capote, on parlerait aujourd’hui d’un autre résultat. Mouillés, mais contents de lui !
     Ainsi se déroula une deuxième de Feria, en plaza de Dax, où malheureusement, le public passa à côté de ce qui aurait été très beau… et très juste !
     Mais... ce n'est là, que mon opinion...

    Jeudi 14 Août – DAX – 2ème de Feria – No hay billetes – Temps menaçant, et pluie à partir du cinquième toro : Corrida d’Antonio Bañuelos, pas très lourde, mais de grand trapio, armée « superior » et « astifina ». Corrida importante, sortant fort, un peu discrète à la pique, mais « remontant » noblement mais « avec caste », à la muleta. Deux toros ont dominé, dans ce domaine : Premier et sixième. Deux toros nobles, auxquels il fallait peut-être donner distance : les deux de Luque. Plus compliqué quoique noble, au début : le quatrième, qui soudain, se mit à chercher durement, sur les deux côtés. Enfin un troisième, probablement excellent, qui se cassa la corne, a mi piton, dans le peto (??) Una lastima!

      Luis Bolivar : Vuelta après un avis ; et Une oreille – On ne reviendra pas sur ce qui a été dit précédemment, mais on retiendra, avec force, sa faena « toute gauchère », après cambio au centre, face au grand premier, très durement armé. Il y eut des naturelles « ultra serrées », où le Colombien montra un cœur « énorme » et un enviable savoir faire. Il y en eut d’autres, citées « de medio pecho », tournant le toro sur la jambe, avancée, qui rappelèrent le Rincon de 91/92. Il y eut… beaucoup d’intensité et se sincérité, en cette faena « sincèrement » brindée à Jean François Mengelle, responsable de « Périples Lointains », dont on sait l’amitié qui le lie à la Colombie. Faena solide, ferme, bien conclue, avant le moment de l’épée.
     Bolivar « voulait les deux oreilles », et c’est la raison pour laquelle il attaqua fort, avec l’épée. Le pinchazo fut très dur, mais l’épée qui suivit fut « a matar o morir ». On connaît la suite : El toro se amorcillo… y falto sensibilidad ! La pétition fut peu convaincante, et le président… manqua de conviction aficionada.
     Luis Bolivar, peu rancunier, reçut le quatrième en une larga à genoux, risquée, et brinda sa faena au public. Débutant par une pedresina « ultra serrée », le colombien attaqua fort, d’entrée. Moments intenses, qui devinrent angoissants suite à une voltereta terrible, le torero montant haut et retombant sur la tête, avant d’être durement piétiné et recherché, au sol. Se relevant, très courageux, Bolivar repartit au combat, imposant une dure bataille, sur les deux mains, se faisant à nouveau menacer par un toro plus incertain, prenant tout à coup un gros « sentido », sur les deux côtés.
     Partant fort, mais habile, avec l'épée, Bolivar laissa un bajonazo, qui roula le bicho. Malgré ce, pétition et l’attribution d’un trophée « de consolante ». Mais… c’est au premier qu’on a fait la faute !
     Daniel Luque : Ovation, et Ovation, après pétition minoritaire – Se montra excellent, au capote, mais déçut fortement à la muleta, dans la mesure où le toreo « encimista », que l’on pourrait ici à comparer à du « tremendisme classique » ne lui va nullement.
     Son premier avait belle charge, en début de faena. Luque débuta joliment, mais se mit très vite « trop dessus », étouffant la charge (peut-être parce qu’il ne la « supportait pas ») et restant « al hilo », alternant cites « pendulés » et  muletazos « au coup par coup », souvent agréables, mais trop répétitifs, qui finirent par ennuyer un peu. Faena « que l’on attendait pas », et torero… dont on attendait mieux. Il tua « muy trasero » et s’étonna que l’on ne lui accordât point meilleure récompense. Hombre!
     De même, sous la pluie, face au cinquième, Luque parcourut beaucoup de terrain, tirant de bons muletazos, isolés et « sans transmettre ». Tuant vite, le sévillan et ses accompagnants « espéraient plus », mais le public attendait « autre chose » de lui…
     Une petite « régression », au vu d’autres actuaciones. Dommage ! Du moins c’est une impression, un sentiment. Mais, cela dépend… des sensibilités !!!
     Joselito Adame : Silence ; et Silence après avis – Devra être revu ! D’abord, en pleine possession de ses moyens et talents (sa lésion à la main, à Orthez, l’empêcha de banderiller) ; et ensuite, avec un peu plus de « bonne étoile ». En effet, un toro qui se casse une corne, en premier ; et la pluie, pour affronter le grand dernier, avouez qu’il y a mieux, comme conditions de succès. Cependant, on restera, personnellement, sur une impression mitigée :
     Il n’aurait « même pas » du faire mine de vouloir toréer son premier, sur le piton mutilé. De plus, le toro, noble, était très faible... Asi que...
     Par contre, on le vit « malin » et « élégamment électrique » devant le dernier de l’ondée, noble mais solide et encasté. Adame multiplia les demi passes, les recortes et les adornos, souvent sur le voyage, mais dut « rendre les armes », pas très bien, d’ailleurs.
     Peut-être qu’en d’autres conditions, sur un autre « piso », les résultats eurent été tout autres… mais on en doute !

 

DAX : « UNA DAMA… QUE YO SE ME ! »
El Fundi… par  la Porte Grande
Rafaelillo… par la porte des cuadrillas!

     16 Août: C’est une de ces personnes que l’on rencontre tant de fois qu’on finit par saluer... Personne ne sait qui a fait le premier pas, le premier sourire. Puis, on se retrouve souvent, au patio des plazas, en un simple plaisir d’amitié et d’Aficion communes. Elle est petite, blonde, sportive en diable et… grande amie del Fundi, et depuis longtemps ! Toujours de blanc vêtue...  Oh, vous la connaissez sûrement ! Elle est « buena aficionada » et « aun mejor persona » !
     Bon ! Admiratrice du Fundi !!  - Allez! On peut la comprendre, et de toutes façons, l’amitié commande tout.
     En tous cas, notre amie vit deux années « de dulce ». Et à en voir son sourire, à chaque rencontre, même lorsque l’on « bouscule » un peu son torero, on sent que « tout va bien », et que le Madrilène de Fuenlabrada est en pleine bourre. Entre autres, Séville, Madrid, Nîmes, Vic, Mont de Marsan (mais là… on joue « en casa » !) San Sebastian, Malaga… sont là pour le démontrer. Aque si? Avouez que cela tourne bien, pour le Fundi !!! Partout, des médailles d’or, et notre amie est aux anges, depuis « bien avant Pékin ».
     Et hier à Dax : nouveau « carton plein » ! Trois oreilles aux toros del Hoyo de la Gitana ! « No hay quien le paré, a este ! » Personne ne peut l’arrêter… et c’est tant mieux!
    
Et moi, dans mon coin, je me dis: « Ayy! Ce soir à Dax, qu’est ce que je vais encore entendre! Elle va être là, tout sourire, m’attendant de pied ferme ».
     Et à tout dire… elle aura bien raison, « la Dama…que yo me sé ! »

     15 Août – DAX – 3ème corrida de Feria – No hay billetes – Temps menaçant (on a reporté la Rejoneada du matin, au 9 Septembre): Toros de Hoyo de la Gitana, les trois derniers « supérieurs ». De comportement inégal aux muletas, les trois, quatre et cinquièmes montrant grande noblesse. Les plus ardus : premier et surtout deuxième, court de charge, compliqué. On fit porter le mayoral a hombros, ce qui divise les opinions, aujourd’hui.
     El Fundi :
Une oreille et Deux oreilles – Le métier, la vista, l’envie et… deux gros coups d’épée. Il n’en fallait pas plus pour que le Madrilène n’ouvre une nouvelle Puerta Grande. A noter la bonne faena au grand quatrième, toro brave et noble, avec des moments « muy a gusto ».
     Rafaelillo : Ovation et Deux oreilles – Le Murciano, revenant de blessure, ne laissa point passer une nouvelle occasion de démontrer, dans le Sud-ouest, « valor y poder ». Cela se passa au cinquième, avec une faena vibrante, sur les deux mains, close d’un coup d’épée « géant ». Rafaelillo sortit a hombros, lui aussi, mais par la porte des cuadrillas. Gros dilemme, pour les photographes ! Devant son premier, rajado, il fallut se battre…en sachant que c’était vain.
     Julien Lescarret : Ovation et Une oreille – Toucha un premier adversaire, noble mais limite faible, que son piquero avait mal arrangé. Le sixième s’avéra noble, permettant au diestro Aquitain une faena « intermittente » où l’on retiendra de bonnes naturelles et un coup d’épée volontaire, « al encuentro ». 

 

DAX : « UNE QUESTION SE POSE…! »
Quatre oreilles, pour un Enrique Ponce « imparable » !

     17 Août : Une question se pose… une seule : « Combien d’oreilles aurait coupé Enrique Ponce, hier à Dax, s’il avait lidié, seul, les six toros de Samuel Flores ? »
     - On peut parier sur « huit ou neuf », et même, en se risquant un peu… « douze et deux rabos ».

     Ca y est ! Je vous vois sourire ou froncer les sourcils… « Le voilà qui dé… à nouveau ! » vous direz vous en chœur.
     - C’est bien possible ! Pourtant, l’insolente facilité et « l’énooooorme classe » avec lesquelles le diestro de Chiva a coupé les deux oreilles de chacun  de ses toros, hier, nous fait poser ce pari qui, pour être « idiot », n’en n'est pas moins « jouable ».
     Pourquoi ce pari ?
     – Tout simplement parce qu’Enrique Ponce, « savant » et immense torero, grand connaisseur de la ganaderia et de ses caractéristiques, a « compris » ses deux toros, à la perfection, tandis que ses jeunes collègues… n’y sont pas parvenus.
     Ponce a « compris » ses deux toros, et les a magnifiquement toréés, en les lidiant tout au long de chaque actuacion, avec cape et muleta. Et s’il avait pris « les six », le Ponce d’hier, à Dax, les aurait « compris », les auraient « lidiés », de la même façon… et leur aurait coupé « tout »... Si, si !!!

     Cinq oreilles, en plaza de Dax : Quatre pour un authentique « maestro », un réel « Figuron del Toreo », et une oreille, toute petite, pour un Juan Bautista, méconnaissable après sa grande journée de San Sebastian, complètement « écrasé » par ce qu’il venait ce voir, quelques minutes avant de s’ouvrir de cape.
     Certes « passer derrière Ponce, quand il est… « comme ça ! » semble être mission impossible... Raison de plus pour rester soi-même, avoir un peu de psychologie du public, faire « court, mais bien et ... intense! »… et ne pas aller se perdre dans des adornos « à deux sous », lorsque le public a encore dans les yeux, les arabesques « or pur » du Valenciano, au toro précédent.
     Hier, Juan Bautista a coupé « una orejita » qui, je l’espère… ne le trompera pas. Ceci dit, tout respect gardé pour tout homme qui se met devant un toro. No estuvo…Bautista !
     De même Serranito, qui, malgré une évidente bonne volonté et un talent dont témoignent certains gros succès, en des arènes importantes  comme Valencia ou Albacete, n’a rien pu démontrer, en une plaza de Dax ou il compte de nombreux amis. Il est vrai que la voltereta, reçue d’entrée de faena, sur un cambio de dos, mal balancé, avait de quoi vous mettre les idées « en désordre ». Pourtant, à aucun moment on aura trouvé de fil conducteur à deux faenas faites de bons détails, isolés, perdus en un océan « d’essais manqués »…

     Restent… « Ponce et les Samuel » !!!
     On connaît les Samuel Flores « de Dax » : corps volumineux, et cornes « amples », mais « amplement recourbées vers l’intérieur », au point d’aller presque « se serrer les mains » ! Cela ne loupe pas : « Este brocho, brochisimo… pa Dax ! »
     On le sait, et si l’on n’accepte pas.. on ne vient pas ! 
     Samuel Flores, ce sont aussi des sorties «  distraites », de toros « abantos », courant en tous sens, refusant la cape. Avec Samuel Flores, « il faut attendre le cheval ». A la pique, le toro, à la première morsure… sursaute et « se va », comme un gros manso. Parfois, il l’est !!! Mais bien souvent, le toro « qui ne savait pas qu’il fallait pousser », prend un gros deuxième puyazo, pousse magnifiquement, et « y revient » même si la pique est levée. C’est ce que l’on a vu, hier, avec le troisième « encelado en el caballo ».
     Cependant, « un peu de mansedumbre par ci,  un peu de faiblesse par là, pas beaucoup de race »… ce sont des toros qu’il faut comprendre, et auxquels il faut donner confiance, « s’imposer aussitôt… sans les bousculer ! » Dure alchimie!
     Hier à Dax, un seul torero avait « la bonne recette », et comme il l’appliqua avec une grande plastique et une fabuleuse expression artistique… nous avons eu « deux grandes faenas ».
     On ne vous fera pas l’insulte de conter « comment est Ponce.. lorsqu’il est bien ! » On vous dira simplement qu’hier, en plaza de Dax… Enrique Ponce fut « mieux que jamais ». En un authentique « Numero Uno ! »
    
Alors bien sûr, certains diront : « Quatre oreilles, devant de telles « babosas », et en tuant mal !!! »
     - Peut-être… mais deux questions se posent : « Pourquoi les gens avaient ils dans les yeux, un tel bonheur ? », et « Pourquoi les deux autres diestros n’en n’ont-ils pas fait autant ? »
     Digo yo !!!!

    Samedi 16 Août – DAX – 4ème corrida de Feria – No hay billetes – Tarde agréable: Six toros de Samuel Flores (dont les deux premiers, au fer de Agustina Lopez Flores), très « parejos », très similaires de présentation : volumineux mais bas, armés « très largement brochos », les cornes se développant « vers l’intérieur ». Toros qui firent tous la même sortie, « abantos », sans fixité, pratiquement impossibles à toréer de cape, excepté le quatrième, par Enrique Ponce. Toros qui refusèrent souvent le premier fer, ruant et fuyant comme des cabris, mais poussant dur sur la deuxième entrée, notamment le troisième, prenant bravement un gros puyazo, « encelandose » et y revenant, par deux fois. Toros de peu de forces, en général, mais qui « allaient et venaient », nobles et un peu « sosos », à condition de les soutenir et leur donner confiance, d’entrée. Le premier sembla le meilleur, mais on aurait voulu voir ce troisième « en d’autres mains… de Chiva ». Les quatrième et cinquième eurent grande qualité, le dernier se montrant plus rétif.

      Enrique Ponce : Deux oreilles ; et Deux oreilles après un avis (avec quelque protestation) – En a « écoeuré certains »… et « ravi » tout le monde ! Il est vrai qu’une telle facilité frise l’insolence, et qu’alors, tout est bon pour vouloir nier l’évidence. Des « petites bêtes », on en trouve toujours… Pourtant, il sera difficile de contester « l’incontestable » !
     Peu importent, à la limite, « une oreille seulement, ou deux ! »… ce qui importe, c’est le talent ! c’est « la maestria » ! c’est « l’intelligence, la technique.. et le courage ». Même transformé « en petit toutou », comme on l’entendait parfois, un toro reste un toro, animal intelligent, qui ne pardonnera pas la moindre erreur… Aussi ne peut on que se découvrir devant ces deux « monstres » de faenas, exécutées par un Ponce « en pleine forme », en pleine veine, et en pleine… Aficion! Et cela… après dix-huit ans d’alternative.
     Que faudra t’il retenir ? – La douceur ! Le temple, dans le toreo fondamental, tant à droite, que sur nombre de naturelles, « soupirées » ! La profondeur des adornos enchaînés, faisant exploser la plaza et « mitrailler les photographes »…  Une passe, une photo « de cartel » !
     Il y eut, en fin de première parfaite faena, un pecho « historique », préparé d’en bas, et « roulé » sur l’épaule contraire. Indescriptible !
     Il y eut, face au quatrième, un peu plus faible, un « tres en uno » ; des naturelles citées « une à une », muleta repliée au bras ; mais surtout, des adornos et de remates où le torero, comme transfiguré, fou du bonheur de toréer, s’est complètement « abandonné ». Un adorno… mille photos !
     Bien sûr, les épées auraient pu être « plus !»… Ponce tua le premier d’une lame desprendida ; et le second, en deux envois (pinchazo et lame trasera )…
     Bien sûr, cela pouvait engendrer contestation, surtout pour ceux « qui n’aiment pas le diestro, quoi qu’il fasse » (et « écrivent » même leur mauvaise foi) Pourtant, un fait est là : Ponce, hier en plaza de Dax, a été « fabuleusement Torero ». Y ya esta !
     Juan Bautista : Palmas, avec « division » lorsqu’il vint saluer ; et Une oreille, en partie contestée – Aura fortement déçu ceux qui, après « lo de San Sebastian », se la promettaient belle, pariant sur un triomphe en France qui, d’un coup remettait à l’heure, toutes les pendules.
     Il n’en fut rien, l’Arlésien « naviguant » tristement, mécaniquement, platement, dans une faenita mal inspirée et sans goût (les manoletinas, alors que la faena avait coulé !) devant un premier adversaire faible et soson, estoqué « muy desprendido ».
     Face au cinquième, dont la longue charge sembla l’inspirer, le Français alla « citer loin », mais ne transmit que peu d’émotion au cours d’un long trasteo, mieux conclu avec l’acier. « Orejita » qui ne doit tromper personne.
     Certes « passer derrière Ponce », quand il est « comme ça » doit être difficile, mais Juan Bautista, en de telles circonstances, se devait d’être bien mieux, comme il le fut, l’an passé, derrière « le coup de tonnerre » du Juli, au quatrième Montalvo. Oui mais voilà.. c’était « l’année dernière » !
     Serranito : Palmas et pitos mêlés ; Applaudissements discrets – Na pas connu la journée dont il rêvait sûrement, comme on rêve… d’une grande opportunité. Bien sûr ses amis proches lui trouveront des excuses (notamment « les idées en vrac », après une dure voltereta, d’entrée) et personne ici ne contestera sa bonne volonté ni son courage, de même que le fait de toucher le sixième, plus retord… Mais, malheureusement, on est bien obligé de constater que, malgré tous ses efforts et de jolis détails, isolés, Serranito n’a jamais pu parvenir à « transmettre », et encore moins « à passionner ».
     A son actif, de très bons passages au capote, dont un quite par chicuelinas, ultra serrées ; quelques bons enchaînements liés à de jolis pechos, devant un troisième qui lui infligea une dure voltereta, sur le cambio dans le dos, ouvrant la faena.
     Y poco mas ! Des hésitations, des replacements, un bien vilain coup d’épée, très en arrière et de travers, au troisième. Devant le sixième, qui débuta en cherchant la bagarre, mais finit par « cantar la gallina », rompant le combat et partant à la barrière, Serranito fit ce qu’il put, sans parvenir à intéresser une plaza qui attendait déjà… la sortie a hombros d’Enrique Ponce, par la plus grande des portes de Dax. Terrible !  

 

DAX : « EL RIO… A COULE »
Une oreille à Perera, in extremis !

     18 Août : Deux toros faibles; un toro qui perd un sabot au cours de la faena ; un toro qui subit une grave lésion, d’entrée au ruedo, et, après vingt secondes  de tristes sauts de carpe, étendu sur le sable, se relève « descordinado »… il n’en fallut pas plus pour plonger la dernière corrida de Dax dans la torpeur et l’ennui.
     Les toros « del Rio » ont coulé !
     Malgré la présence du ganadero, les toros de Victoriano del Rio, très bien présentés et armés, ont fait couler la corrida, en partie sauvée par les deux toros du « second fer », de Cortes, l’un permettant au Juli de démontrer que « ça coince un peu, en ce moment ! », notamment en une détestable façon de porter ses estocades ; l’autre qui démontra le grand moment de Perera, même si la France, et en particulier le Sud Ouest, dédaignent à le reconnaître. Au milieu, Jose Maria Manzanares se contenta de quelque minimum syndical, face à deux toros tristes, l’un parce que flojo ; et l’autre parce que manso, aquerenciado en tablas.
     Restent « de bons détails » : Certaines naturelles du Juli, au quatrième ; Un pecho de Manzanares ; les delantales de Perera, au trois.. sa faena, au sixième. Et au milieu… coule une rivière d’ennui.

     Le dernier toro de la feria, un mastard portant le fer de Cortes, permit à Perera une faena « doucement autoritaire », avec une terrible facilité à lier les passes fondamentales, au point que cela en devient d’un « répétitif lassant » (quoique techniquement admirable) ; puis à enchaîner d’incroyables muletazos entrelacés, tricotés à l’envers autant qu’à l’endroit, au point que toros et publics en perdent la boussole, et que lui-même en tombe tout seul…
     Pourtant, le public reste froid, comme s’il hésitait à « se laisser aller à laisser éclater son admiration ! » Parfois, un « olé ! » commun est bien forcé de sortir de mille poitrines, tandis que cinq mille cœurs « soupirent » et siffloteraient presque « Ah, c’qu’on s’em.. nuie, ici ! »
     Sacrilège que cela, car, regardez bien : Perera « torée ! ». Il conduit le toro, il « impose » au toro, un trajet qu’il ne voulait pas forcément prendre ! Sa muleta est plane, rarement, très rarement touchée… et ses pieds sont bien à plat au sol… Señores ! On peut ne pas forcément goûter, mais en aucun cas « nier » !

     Reste la mélancolie !
     Reste « l’Agur », ce bel adieu à la feria de Dax 2008 !
     Reste le gamin qui torée de salon !
     Reste « la ilusion » de centaines de jeunes qui rêvent d’être un jour Fundi ou Perera…
     Reste « le respect » à la vieille dame, grande actrice Française, que l’on a voulu utiliser en un faux combat qui n’est pas le sien. Dax est « grande » ! On y est formidablement accueilli ! Alors, que personne ne vienne « salir », « médire ou mépriser »… car cela, ce n’est pas Dax !
     « Mala suerte ! », pour cette dernière de Dax 2008 ! Sous son panama, don Victoriano del Rio dira plutôt : « Mala pata ! »

    Dimanche 17 Août  - DAX – 5ème et dernière de feria – No hay billetes – Ciel magnifique: Six toros de Victoriano del Rio, dont deux (1 et 6ème) sous le fer de Cortes), magnifiques de présence les 1, 3 et 6, variopintos, bien armés, les 2 et 4 « tapandose con los pitones ». Hélas, le lot souffrit de nombreux accidents, les 2 et 3 « flojeando » d’entrée ou a mi faena ; le quatrième perdant un sabot, douloureusement, durant le trasteo, et le cinquième, se péguant « una costalada » dès sa sortie, s’écroulant d’un coup, essayant de se relever, en de douloureux sauts de carpe, se relevant enfin pour reprendre quelque course « en tanguant beaucoup ». Le président Amestoy sortit rapidement le mouchoir vert, ce que ne perçut pas le public, immédiatement (Une sonnerie « spéciale » aurait peut-être « centré » les attentions sur le palco). Sortit alors un sobrero de Abilio et Ramiro Hernandez, qui s’avère être le second fer de Los Bayones. Le toro à la tête bien frisée ne fit illusion que durant quelques instants… Dès le début de la faena, « canto la gallina ».

      Pourtant, les Victoriano avaient de la bravoure, comme le premier, romaneando al caballo ; le troisième, qui poussa « muy fijo en el peto…et se montrèrent nobles, en général… Mais, « faiblesse et accidents... Mala pata » !!!
     El Juli : Ovation rapide, et Silence – Ne semble pas très préoccupé de  faire plaisir au public. Si cela marche, tant mieux, sinon… quatre derechazos, deux naturelles, un « Julipié », et « adios, à la prochaine,  en Septembre ! ». Passe encore les faenitas, sans appuyer, comportant de très bons passages, mais en tout cas, il va falloir maintenant censurer avec énergie sa façon d’attaquer à l’épée. Ces deux pas de côté, avant même que la lame n’atteigne le toro, et « très bas » ou « loin, de côté », deviennent inadmissibles de la part d’un torero de cette trempe.
     Hier, à Dax, Juli n’était pas à son affaire ! Peut-être digérait-il encore mal le « Niet ! » de l’empresa, devant son « désir » de changer quelques éléments du lot de Victoriano qu’il avait été voir au campo, dit-on ! On retiendra cependant quelque quite, quelques derechazos au premier, qui méritait mieux que cette « faenita » rapide et sans âme ; et trois grosses naturelles au quatrième, devant lequel « il voulait » probablement, mais qui s’abîma durant la faena, perdant un sabot, avant de mourir, d’un Julipie sans respect. Devant le premier, l’épée fut plus infâme encore.
     Juli nous doit un desquite, et nous serons les premiers à chanter bien haut, une « vraie estocade », poussée « droit, et dans le haut ! ». Quand sera-ce ?
     Jose Maria Manzanares : Silence ; et Silence – Fut plus « impressionnant » dans ses dévotions avant que ne sorte son toro, que dans ses interventions.. lorsqu’il fut sorti. Mal servi, un peu goguenard, l’Alicantino fit un peu penser à Papa, quand il voulait à peine. Il n’était jamais « mal », mais démontrait… que cela ne valait pas la peine ! Son premier fut faible, et Manzana hijo « s’étira » sans grande conviction. Et lorsqu’il prit la muleta, devant le sobrero cinquième, il savait déjà que… Il avait raison, le toro filant aux barrières, à peine après un premier couplet. Mato rapido, sin mas !
     Pas de chance au sorteo… Certes !
     Miguel Angel Perera : Silence et Une oreille – Reçut son premier par delantales très propres, avant de débuter, impavide, par autant de passes hautes, sur place. Le toro, qui avait poussé bravement vers le centre, n’aguanta pas les allées et venues, finissant par avouer sa faiblesse. Perera s’arrima au soleil, jouant l’ombre et la lumière en des allers et retours qui ne passionnèrent pas. Une estocade, desprendida, en attaquant fort.
     Devant le gros dernier, Perera monta la faena « de maintenant », démontrant grand temple en plusieurs séries sur les deux mains, parfaites techniquement, mais « sans sel », et finit par « secouer le public » en plusieurs enchaînements alambiqués, à deux doigts des cornes, jouant plusieurs « pile ou face » qui méritent grand respect. Après pinchazo, Perera porta un gros coup d’épée qui tua vite en provoquant gros derrame. Une oreille… parce qu’il en fallait bien une !   

 
DAX 2008 FERIA DE SEPTEMBRE
 

DAX : « AIMABLE ET DEPASSIONNE ! »

     7 Septembre : Qui dit corrida de toros, dit… « Toros » ! Et qui dit « mano a mano » dit « competencia », duel, bagarre « a qui met le bain à l’autre ! »
     Hier, en plaza de Dax, on chercha l’un, et l’on ne vit jamais l’autre.
     Une corrida « terciada », pauvre de tête, faiblissime, noblona et sans race, avec un quatrième toro « indigne de Dax »… Et des toreros qui ont joué « la quantité », chacun faisant son job, mais sans passion, sans coup de cœur ou « coup de ventre ». Ce n’est qu’à la sortie du cinquième Montalvo qu’un Juli bougon et sans flamme, jusque là horrible tueur, a montré ce « qu’il aurait pu donner » s’il avait vraiment été dans le coup du mano a mano… En six delantales, pieds joints, sans bouger d’un centimètre, le Juli a soudain allumé la flamme, ou « la flamèche », d’une tarde dépassionnée et « aimable », le public Dacquois  ne manifestant aucunement devant la sortie d’un quatrième, imprésentable, dont le cul était plus maigre que celui de la fille de ma concierge…
     Avec mes respects et mes excuses, « on ne vous comprend pas, amis Dacquois ! » Certes il y eut des oreilles ! Certes il y eut « double salida a hombros ! » Certes il y eut « Salsa para todos ! », mais pardonnez moi… Cette fois, « la sauce n’a pas pris ! »  Y cuanto lo siento !
     De Juan Bautista l’on retiendra les coups d’épée et quatre naturelles de face, au dernier de la soirée. Pour le reste, le sable et or de son costume se confondit avec celui du ruedo de Dax, au cours de longs monologues où il sembla se joindre au public, pour essayer de trouver… un peu de passion !

    Samedi 6 Septembre – DAX – Première corrida de la Feria de la Salsa 2008 – Plaza pleine – Tarde agréable et « sèche », après une matinée où la corrida de rejoneo de la Feria, renvoyée à cause de la pluie, subit le même sort, encore une fois : Six toros de Montalvo, de peu de trapio, le quatrième étant indigne de cette plaza. Le deuxième de la tarde sortit « descoordinado », et fut immédiatement rentré au corral. Son remplaçant, du même fer, fut le plus armé de la corrida, asfino et plus long que tous. Corrida faible, à peine piquée; sans race, excepté chez les deux derniers, le sixième rematant « vers le haut », qui blessa un cheval, en lui « montant » au cou, directement. Corrida noble, en particulier les toros de Bautista, et surtout le cinquième, pastueño, du nom de « Vigilante ». Toro noblissime et très limité de forces, à templer « avec des pincettes », ce que fit très bien el Juli. Hélas, corrida « morne », qui ne suscita aucune passion. Déception totale, des Montalvo, tant au « plumage » qu’au « ramage ».

      El Juli : Applaudissements au tiers ; Silence avec quelques sifflets ; Deux oreilles – A tué très vilainement ses deux premiers adversaires, multipliant sans honte des « julipiés » dont le public, peu à peu, découvre la supercherie. Certes ces deux toros « ne méritaient » guère autre chose, mais, renfrogné et comme « absent », Julian Lopez supporta la première charge du toro d’ouverture, dans chaque série, pour ensuite la conduire à son aise, notamment sur main gauche. Final par passes hautes et… passons à d’autres choses.
     Devant le troisième, qui s’arrêta, après trois doblones « hauts », et se mit à gratter consciencieusement le sable déjà meuble du ruedo, le Madrilène sut aguanter plusieurs charges « de rage  et sans aucune classe », sur la gauche, avant d’entendre des sifflets pour une conclusion sans honte, en sept épisodes (quatre entrées, dont un metisaca « muy feo », et trois descabellos.
     Heureusement, on retrouva le Juli « tel qu’il aurait du être dans un mano a mano, dès le paseo » : Ambitieux, vibrant, bref… « en figura ! » qu’il est. Dès sa sortie, le cinquième lui plut (à moins que le torero, d’un coup, ait décidé de hausser le ton, et gagner son semblant de duel avec Bautista), et Juli « joua » avec le toro : Tout d’abord, six véroniques en tablier, pied joints, sans bouger d’un centimètre, les bras et la ceinture « allant chercher » le toro qui passa en de nobles va et vient. En conclusion de cette brillante entame, une talaverana, une demie et grande rebolera. L’ovation éclata, enfin unanime. Au cheval… « un picotazo de na ! », et Juli s’envole pour un quite par « lopezinas », pas très limpio mais de gros effet sur un public qui, à ce moment, ne demandait qu’à s’enthousiasmer. Brindis à tous, décidé, et joli début par passses hautes, au tercio. Ensuite, la faena va devenir un festival de « douce puissance » : « accompagnant » les charges nobles et suaves du faible « Vigilante », Juli va se régaler en tirant doucement des droitières à mi hauteur, très templées, « codilleando » volontairement, toréant vertical, le coude cassé, avec grande douceur. Faible mais plein d’envie, le toro fléchit à plusieurs reprises, mais Juli lui donna confiance, au point d’allonger sa charge, sur main gauche, et de lui imposer au final de longues allées et venues, « à l’envers et à l’endroit ». Faena qui eut gros effet, bien que l’adversité fût infime. Comme le coup d’épée, bien que d’effet tardif, fut entier, décidé et « plus droit », semble t’il, les deux oreilles furent accordées, que le Juli promena avec aux lèvres un grand sourire enfin retrouvé.
     Juan Bautista : Une oreille (un peu protestée) ; Silence ; et Une oreille – A corrigé, en partie, le « mauvais souvenir » laissé au cours de la Feria. Certes le Français mit toute sa bonne volonté, tant au capote qu’à la muleta, mais c’est probablement à son épée qu’il devra une sortie en triomphe que l’on qualifiera « d’aimable et dépassionée ».
     Face au sobrero du même fer Salmantino, toro colorado, astifino, noble mais faible, Bautista monta une longue faena, propre mais sans passion, sans « la chispa ». Comme il tua bien et vite, une oreille tomba, bien généreusement.
     Devant l’affreux quatrième, qui ne fut protesté que lors de l’arrastre, le diestro « ennuya et s’ennuya », mais tua vite, la aussi.
     De fait, c’est encore devant le dernier que l’on retrouva, en quelques bons passages, le Bautista de l’an dernier. Toro castaño, bien armé vers le haut, qui « monta » immédiatement au cou du cheval, le blessant spectaculairement mais semble t’il, sans gravité. Toro « noblon » avec tendance à remater dur « vers le haut », ce qui empêcha une estocade à laquelle Bautista « dut penser », après une faena « longue  et intermittente », dont on gardera trois jolies naturelles de face et des enchaînements de bon aloi, près des barrières. Hélas, il y eut un pinchazo, précédant une nouvelle estocade, de gros effets immédiats. L’oreille fut accordée, permettant à Bautista une sortie « a hombros », un peu discutable, aux côtés d’un Juli qui a sauvé la corrida… « en six coups de cape ! »

 

DAX : « MIGUEL, L’ANGE !!! »
Miguel Angel Perera gracie un toro de Victoriano del Rio.
Dax, divisée mais justement heureuse, célèbre la faena de l’année.

     8 Septembre : Il est dans la vie, des moments magiques où, d’un coup, tous ensemble, on se retrouve « sur une autre planète », une planète où le temps s’arrête, où tous les regards deviennent complices dans le partage de l’admiration et l’enthousiasme… une planète où tous les soucis sont oubliés, l’espace de dix minutes d’un inexorable crescendo où « le cœur et le ventre » font taire toutes les « raisons », toutes les froides analyses…
     Hier, la plaza de Dax et huit mille personnes ont vécu ce moment… Certes, quelques « raisonneurs » auront trouvé bonne raison à ne pas communier… Ils ont leurs raisons, et peut-être... raison! Mais à tout dire, on les plaint un peu...
     Hier, un homme et un toro ; un grand homme et un petit toro, très brave tant il était noble, ont amené tout un public à une totale euphorie dont le bouquet final, longuement attendu, fut « l’indulto », la grâce du toro…
     Bien sûr il est possible de contester, on y reviendra… Bien sûr on reprochera à Miguel Angel Perera, de ne pas avoir « le sentiment » du Morante, d’être « un laborieux », parfois pesant, qui met et remet dix fois, cent fois, son métier sur l’ouvrage… tandis que Morante, sur « un muletazo »…
     Cela peut être vrai, mais il me semble que certains muletazos, certaines entames, certains remates de Perera, hier… si c’est Morante qui les donne, pues… « apaga y vamonos ! ».

     Hier, Miguel Angel Perera, d’un bout à l’autre d’une faena parfaite, intense, à la fois douce, suave, coulée, léchée, mais aussi « puissante », impérieuse, totalement dominatrice, a  monté un véritable chef d’œuvre, parfaite illustration du Toreo d’aujourd’hui, avec « les valeurs d’hier »...  Et que l’on ne parle pas de « répétitif », face à une babosa sans force ou sans malice… Certes le toro était « petit », certes il était « très noble »… Certes il n’avait pas été piqué, pratiquement, mais il était brave, et sa noblesse allant crescendo, son envie de charger et charger encore, dévoilèrent sa vraie bravoure…
     Bien sûr que l’on pourra discuter, et en cela, cette dernière tarde Dacquoise « alimentera » bien des discussions, dans les Clubs et Peñas, autour d’un feu d’hiver… Bien sûr que « règlement en main ! », le dos courbé sous le poids « des tables de la Loi », le toro n’avait pas été piqué, « qu’on ne l’avait pas vu au cheval », et qu’à ce titre, n’étant pas « complet », il ne pouvait être question « d’indulto ». Mais quand à la fin d’un tel faenon, le toro « demande » et « en redemande encore », dévorant la muleta et « les kilomètres », on peut tout à fait entendre que « l’on n’a pas le droit » de laisser partir cet animal vers le repos éternel, surtout en une époque où « l’on espère », à chaque paseo, que la plupart des toros « permettront un peu ! » A l’heure des toros « tardos », « parados », « rajados », « cantando la gallina » parce que le torero a un peu trop baissé la main, on n’a pas le droit de laisser passer celui qui accourt, avec brave noblesse, au moindre toque…

     Hier à Dax, Miguel Angel Perera a monté un véritable chef d’œuvre, digne de celui dont il porte le nom… Mêlant le temple, la cadence, la douceur et la force, le torero « se salio », « sortit de lui-même… et se regarda toréer ! ».
     Vous souvenez vous de l’entame : Deux cambios dans le dos… Bon ! On connaît ! Cela devient presque « routinier » On ne s’étonne plus de rien ! Mais, un troisième cambio, puis le pase de las flores, en huit aller et retour impressionnants de force et de saveur… avouez que ! Et il n’est que de voir « le coup d’bouc » du torero, au sortir de la suerte, pour être sûr qu’à ce moment précis, Perera « se sentait » immense torero, et qu’il savait ce qu’il allait monter.
     Savait il que le tout serait si parfait, si coulé, si lié, si « plein de trouvailles joliment mêlées », que l’on arriverait à ce dire « Mais bon Dieu ! Que ce toro est brave, avec ce qu’il lui met ! » Peut-être en rêvait il! Il savait le toro, noble... mais peu à peu, la noblesse devint « authentique bravoure », et c’est pour cela que le public tout entier arriva à demander « l’indulto ». Et cela fit du bruit! Une belle fièvre, qui montait, montait...
     En bas, le torero interrogeait, alors que la bronca naissait, dès qu’il faisait mine de monter l’épée. En haut, au palco, le président gardait la main sur « le règlement… et « la raison », dont il était le double garant. En cela, il était parfaitement dans son rôle, et personne, ici ou ailleurs, n’aurait voulu être à sa place, en ces instants.
     Ce furent de longues, longues minutes, de « bras de fer » entre les deux concepts « de la bravoure et de la noblesse ». Puis, tandis que huit mille gorges (moins quelques unes) hurlaient la supplique, le président, lui aussi très noble, accepta, laissant parler « le cœur et les tripes ». Car en bas, « Desgarbado », (littéralement « le vilain pas beau, sans élégance ni classe », continuait de charger et charger, sous les derniers coups de pinceau d’un torero qui, ce jour, devint… un grand artiste.

     A l’heure où j’écris cette chronique qui, je le sens, sera « bien trop longue », une fois de plus, je n’ai lu aucun de mes collègues, sur d’autres pages… et peut-être vais-je à l’encontre de tout ce qu’ils ont écrit. Tant pis… j’assume, et je signe ! Hier, pour moi, « le » grand artiste de la tarde, fut Miguel Angel Perera, et le « laborieux » fut Morante de la Puebla. « Y eso que soy Morantista!! », vous le savez amplement.
     Hier, et même s’il fut bien, très volontaire, ce ne fut pas le Morante que l’on rêvait de voir. Le Morante « vertical », seigneurial… le « Cagancho des années 2000 » ou « le Pepin Martin Vazquez de toujours ». Son « inspiration » actuelle le poussant à des remates « agachados », vilainement courbé, le cul en arrière, que l’on prend pour de l’art, tandis que l’on peut aussi penser que ce n’est que « du précautionneux fleuri », nous éloigne du « garboso », de « l’empaque profond » qui fut le sien… « avant ». Hier, le Morante de la Puebla fut « laborieusement baroque », souvent « très torero »… mais « l’artiste » du jour, dans un autre registre d’immense toreria… fut Miguel Angel Perera.
     La France et Dax ont eu la grande chance de vivre ce moment, et de le vivre, comme Dax, seule, sait le vivre… et le faire vivre. « Avec le cœur et les tripes… autant qu’avec la tête ! ».

     Corrida qui partait bien mal ! Corrida « chica », dans le trapio et « les idées »… Mais corrida qui finit en véritable apothéose, « unique » et méritée, grâce à un toro « très brave à force d’être noble », et d’un immense torero…
     Chapeau à « Desgarbado », qui mérite son destin futur !
     Monterazo à Miguel Angel Perera, immense torero, hier… et superbe artiste !
     Chapeau à Dax, qui a voulu parler « avec le cœur », même si elle savait que « la raison » disait le contraire. Et chapeau au Président… qui a su l’entendre! 

     En premier rang de la barrière, un homme, un torero retiré, un grand, un immense torero, les yeux plissés par la concentration, suivait, étonné, la faena de son jeune collègue… A ses côtés, sa belle et adorable épouse, qui ne lui lâcha la main que pour se lever et, dès les premiers instants, demander l’indulto de « Desgarbado ». Le torero en question était le maestro Cesar Rincon, et lui aussi, quelques instants après, du mouchoir et du sifflet, s’est joint à l’immense clameur… Torero, ganadero, « immense persona », par sa sincérité et sa « noblesse de brave », Rincon se laissa aller, lui aussi, à la grande communion… obtenant, lui aussi, la vie sauve du petit toro vilain, tellement noble qu’il en était… « immense » de bravoure !

     Ah oui ! Un « superbe détail » qui dit, encore une fois, qu’à Dax, « il y a quelque chose qui ! » : Lorsque « Desgarbado » fut rentré au corral et que l’on attribua au torero « tous les trophées, symboliquement », on n’alla point, comme il arrive souvent, courir au desolladero chercher les deux oreilles et la queue d’un toro précédent… Ici, l’alguacil remit au triomphateur, en une superbe improvisade, trois mouchoirs immaculés, symbolisant tout « le moment parfait », vécu ensemble…
    Un joli geste de plus, « un detalle » qui fait qu’à Dax, on aime à y venir et y revenir…
     Enhorabuenas mil !

    Dimanche 7 Septembre – DAX – 2ème corrida de la Feria de La Salsa – Gros plein et belle tarde : Toros de Victoriano del Rio, de présence très inégale, et de comportement décevant, très limités de forces, arrivant « noblones » mais avec bien des défauts au troisième tiers. Sortant « abantos », distraits, corretones, ils ne permirent que peu de choses, au capote. Les piques furent courtes, quoiqu’intenses, parfois, mais aucun n’arriva « facile » à la muleta. Aucun… sauf « Desgarbado » - petit toro noir, de 486 kgs, sorti sixième. Un toro qui ne brilla guère, dans les deux premiers tiers… mais un toro qui alla « a mas y mas », chargeant de loin, avec « du moteur », une énorme fijeza, une immense noblesse et au final, une telle « bravoure » (alors qu’il n’avait reçu qu’un picotazo », que peu à peu, la plaza toute entière, en demanda vies sauve, et finit par l’obtenir.

      En fin de paseo, Dax fit saluer Enrique Ponce, qui invita les collègues à partager les bravos. En barrière d’ombre, accompagné de son épouse Natalia, Cesar Rincon reçut de nombreuses marques d’amitié.
     Enrique Ponce : Silence après un avis ; et Silence – Sembla « trop facile » et se passa de faena, devant le noble mais bien fade premier. Elégance, technique, mais pas de passion… et deux désarmés. A la mort, le Valenciano piqua deux fois, vilainement, et perdit une petite oreille.
     Le quatrième sortit « avec quelque chose » à une patte, mais fit oublier cette passagère faiblesse en un puyazo « romaneando », finissant par un gros batacazo, plus « malin » que brave. Il sortit de la deuxième rencontre, affaibli et le piton gauche en charpie. A la muleta, il se défendit plus qu’il n’attaqua, et Ponce multiplia vainement de longs efforts, et finit par ennuyer un brin. Cette journée n'était pas sienne!
     Morante de la Puebla : Ovation et Une oreille après avis – Ne put jamais « se libérer » tout à fait, tant au capote qu'à la muleta, du fait du manque de vraie noble bravoure de ses adversaires. Pourtant, Perera monta à son premier adversaire un quite par le haut, formidablement « double rematé », qui disait que le toro « avait quelque chose », à condition de rester quieto et de le convaincre plus que le forcer. Le Morante 2008, plus « vibrant » que profond, plia le toro par le bas, et « l’obligea » en de nombreuses séries sur chaque main, sans n’obtenir jamais « la grande communion ». Un Morante, en quête du moment parfait… qui n’arriva pas. Devant le cinquième, la faena fut très longue, mélange de classique et de baroque, les passes longues et « galbées », avec quelque profondeur, se mêlant à des remates baroques, très penchés en avant, inesthétiques, ce qui est un petit comble, pour le Morante. Cependant, tout « génial » tutoyant le grandiose ou le ridicule, on laissera à chacun sa propre appréciation. Cela dit, on retiendra la grande volonté du Morante à « travailler », pour tirer la série parfaite… à laquelle il ne parvint pas, tant l’adversaire était âpre et inconstant dans ses charges. En un mot, un Morante qui coupa une oreille, après un coup d’épée, pour lui, très honnête. Mais… « ce n’est pas le Morante que l’on attendait ! »
     Miguel Angel Perera : Silence et « Tous les trophées, « symboliques », du toro gracié – S’est immédiatement signalé par un quite ahurissant de stoïcisme et de serré, en ses deux remates, sans rectifier la position. Sa première faena fut « insistante », alors qu’on priait pour qu’elle fût plus brève, le toro ne valant pas grand-chose, manso, faible, sin raza ninguna.
     Et puis, alors que la corrida « coulait » un peu et que l’on s’attendait à une « redite » de Perera… sortit « Desgarbado » le sixième et dernier de la temporada...  Petit toro, feucho, sortant sans grande fijeza, jusqu’au moment où Perera l’accrochera en trois bonnes véroniques. Le premier tiers se déroulera dans la quasi indifférence, le toro étant à peine piqué.
     Pourtant, le diestro « avait vu » sa qualité, et ne douta pas d’aller brinder, au centre. Et là, pratiquement sur place, Perera va citer de loin, et lier en vibrantes allées et venues, trois cambios dans le dos, suivis d’un pase « de las flores », lié à deux muletazos de remate, grandioses. Explosion dans la plaza et hurlement d’émotion du torero, au sortir d’un tel enchaînement.
     Ensuite, la faena monta… en faenon, la muleta allant chercher loin devant la charge d’un toro qui devint parfaite de rythme, de fixité, de noblesse et de bravoure. Séries « amples », douces mais puissantes, suaves mais sans faille, chaque fois ouvertes par des adornos que l’on qualifiera « d’artistes », par l’attitude torera et l’efficacité, le toro et la muleta se retrouvant à l’endroit précis, au moment précis, pour entamer la séquence suivante. Séries « variées », dans le registre conventionnel, car « rematées » par des enchaînements que beaucoup regardèrent, incrédules.  Faena « a mas », avec un toro qui n’arrêtait pas de charger, en demandait et redemandait encore, avec énormément de fijeza et de noblesse.
     Déjà des voix demandaient l’indulto, bientôt rejointe par une majorité naissante. A sa barrière, l’épouse de César Rincon se leva, un foulard à la main. La pétition allait croissant, et en bas, saoul de toreo, Perera regardait le président. Celui-ci, dans son rôle, lui fit signe de monter l’épée. Une, deux fois, Perera fit mine de cadrer « Desgarbado ». Une, deux fois, la bronca se fit féroce, et se retourna contre le palco. Alors, Perera continua de donner au brave toro, « ce qu’il lui demandait », des passes et des passes, plus seigneuriales, plus « abandonnées » les unes que les autres… Alors la pétition fut générale, féroce. Rincon était debout, fixant la présidence, sifflant et rageant.
     Et tout à coup, la bronca se fit gigantesque explosion de joie : Le président avait plié… et Miguel Angel Perera avait gracié le brave « Desgarbado ». Le torero, très ému (bien que cela ne se refléta pas) simula la mort et le toro partit, tête haute, noblement, beau comme tout, vers son nouveau destin. Dax donna en guise de « Tous les trophées, symboliques », trois mouchoirs blancs, comme autant de colombes de paix, de joie et d’amitié Aficionada.
     Enorme moment, comme fut « énorme » la faena de Miguel Angel Perera, à un petit toro de Victoriano del Rio, nommé « Desgarbado ». Petit par la taille, mais… « énorme » par le cœur ! 
     Enhorabuena… tout le monde !  

 

PERERA, A DAX
L’indulto de « Desgarbado » - La vidéo

     9 Septembre: Après l’événement de dimanche, en plaza de Dax, de larges extraits de la faena de Miguel Angel Perera, face à Desgarbado, désormais fameux toro de Victoriano del Rio.
     Certes, la vidéo amateur (que son auteur soit ici remercié) ne donne pas la complète dimension de la faena, ni de l’émotion que suscita « le crescendo » de l’homme et du toro. Cependant, on peut se faire ici une première idée, que d’autres documents, probablement, viendront corroborer. Ce fut… un grand moment !

     Déjà, Miguel Angel Perera est reparti, suivant le grand fil d’or d’une saison triomphale. Dimanche soir, il en était à 65 corridas toréées en Europe, avec 113 oreilles et 2 rabos. (36 faenas « de deux oreilles », dont Madrid, Sevilla, Barcelona, Pamplona, El Puerto, Nîmes… )
    
Hier, lundi 8 Septembre, Miguel Angel Perera a coupé trois oreilles à la Goyesca de Santoña.

      En vidéo, la faena de Miguel Angel Perera, devant Desgarbado, toro de Victoriano del Rio, indultado sur pétition du public et des professionnels (via youtube): http://fr.youtube.com/watch?v=rMDjwP3t_r0