MONT DE MARSAN : L’UN « Y EST »… ET
L’AUTRE PAS !
Bonne faena de Juan Bautista
Déception majuscule signée Moises Fraile.
25 Juillet : Cela faisait un peu penser à la fameuse « partie de
cartes » de Pagnol, dans « Marius », vous savez :
« Alors, on joue ou on joue pas ? »
« - Moi, je connais très bien le jeu de la manille, et
je n’hésiterais pas une seconde si je savais que Panisse coupe à cœur… »
« Mais bougre d’imbécile ! Si tu avais suivi le jeu, tu le saurais si
Panisse coupe à coeur ! »..
Tout cela, dit avec « l’accent » du Vieux Port, est des
plus plaisants, et chaque fois l’on savoure cette authentique « tranche
de vie », tout autant que l’impérissable souvenir du grand Raimu…
Ici, c’est clair : L’un « y est », et l’autre pas…
sinon, il saurait « si Panisse coupe à cœur ! » Et hier, on ne pouvait
s’empêcher d’avoir la même impression, dans le ruedo de Mont de Marsan.
Certes les circonstances étaient bien différentes, et l’on n’était pas
là pour rire, loin s’en faut… mais c’était ça : L’un « y était »…clair,
net dans ces interventions, calme et souriant ; et l’autre « n’y était
pas », comme « ailleurs », flottant dans son monde intérieur, éloigné de
tout et tous, n’en ressortant que pour s’appuyer l’une des carnes du
Sieur Moises Fraile, le cinquième, mais n’arrivant pas à retrouver « cet
angel », cette sorte de facilité envoûtante qui emporte tout le monde,
toro inclus, vers des sommets de profonde beauté… Souvenez vous de la
faena de Dax, l’an passé !
L’un « y était ! ». Il s’appelle Juan Bautista, qui
encore une fois, hier au Plumaçon, a donné preuve qu’il est actuellement
l’un des meilleurs interprètes du plus pur toreo Rondeño. Il n’est que
de revoir son début de faena, au premier de la tarde ; sa façon de
« mettre la jambe », de charger la suerte, sur les séries classiques,
des deux mains ; sa façon de terminer la faena, quand le toro est venu
aux barrières. Avouez que les trincherazos, les firmas et l’ultime pecho
valaient bien les dix mille manoletinas ou bernaldinas soudain revenues
à la mode. Avouez que cela a… une autre gueule.
Le public bouda un peu le recibir, parce que la lame
n’était « que demie ». Mais c’était un recibir, un vrai, et bien porté.
Clair, net, calme et souriant. Muy torero !
L’autre, celui qui « n’y était pas »… c’est Sébastien
Castella !
Qu’arrive t’il donc à notre Numéro Un ? Quel mal
intérieur le ronge t’il, au point de le voir ainsi « errer dans le ruedo »,
lorsque ce n’est pas son tour, loin de ses compagnons, hors de tout,
comme « pas concerné ». Bien sûr on s’arrêtera sur ce terrible « bache »
avec l’épée, encore une fois traduit par des entrées à matar un peu « en
catastrophe », à son premier adversaire. Mais le mal semble
« ailleurs », et la carence avec l’acier n’en est peut-être que la
conséquence. Alors… « fatigue » d’un torero « atorado », trop sollicité,
en Europe autant qu’en Amérique ? Autre cause possible à chercher du
côté physique : Une lésion qui demeure, après ses terribles blessures,
comme celle de Cali, cet hiver, ou plus discrètement, comme la méchante
voltereta de Madrid, le jour de l’orage… On n’ose penser à une autre
cause, plus délicate : le mal que peut faire « dans la tête » la cornada
de trop, la cogida de trop… Là, on sait qu’il faut plus de temps.
Pourtant, Sébastien Castella a été très bien, hier,
devant le cinquième : un toraco sournois, qui a cherché tous les coups
durs, « amagando », faisant semblant de charger et voulant surprendre
l’homme, comme il l’avait fait du picador, lorsqu’il avait « quitté le
palo », croyant soulager… un faible. Une vraie carne, forte et très
dangereuse. Un roi « du regard en dessous » et du coup « en vache ».
Castella se mit devant, et tenta l’impossible, manquant de peu d’y
arriver, tirant des muletazos certes isolés, mais dont la qualité
n’avait d’égal que le courage « à rester là »… Ce toro demeura dangereux
jusques après la vilaine épée ladeada, pourtant portée avec décision...
le puntillero peut en témoigner qui, malgré les avertissements de son
matador, faillit se faire emporter. Là, Castella montra « qu’il y est
toujours ! » : attentif à ses hommes, prévenant et responsable.
Peut-être méritait il grande ovation de la part d’un public qui n’a
peut-être pas perçu le mérite à être « comme il a été », devant ce toro.
Soyons clairs ! Tous les toreros, absolument tous, on connu « des baches »,
ces passages à vide parfois inexplicables, qui font que soudain… tout
leur coûte, même de dire bonjour à un ami. Tous, absolument tous, ont
vécu ce moment où ils ne savaient pas « si Panisse coupe à cœur », et
ils n’en avaient que faire…
Parfois, un toro, un seul, leur a « quitté le sitio »,
pour une raison insignifiante… Souvent, un toro, un seul « le leur
rend ». Tout à coup un enchaînement que l’on n’avait pas réussi, depuis
des semaines ; une épée, qui rentre exactement « là où on voulait », et
« comme on le rêvait » depuis des mois. A partir de là, comme par
enchantement, le déclic s’est fait et tout rentre dans l’ordre… Alors
« on ne fend plus le cœur » de personne.
En attendant, il faut être patient ! Tous doivent
l’être : Le torero, ceux qui l’entourent, et nous tous… Attendons !
C’est peut-être pour jeudi !
Hier, l’un « y était », complètement : Juan Bautista.
L’autre, beaucoup moins. Quant au troisième, Cesar Jimenez, toujours
bien coiffé, superbement habillé, il est « ce qu’il a toujours été » :
Parfois admirable, souvent irritant, toujours intéressant… avec un gros
« mais ! »
Enfin restent les toros : Mont de Marsan est elle frappé de quelque
malédiction ?
- Il faut attendre et espérer. Je sais que c’est dur à
lire, et si facile à écrire… « lorsque l’on ne paie pas sa place ! »
Pourtant c’est cela : il faut attendre !
Ce n’est plus, on le sait, un problème de « décideur »,
puisqu’à Mont de Marsan désormais, la « démocratie participative » est
de mise…
Certes on peut penser que la présentation n’est pas
toujours au rendez-vous, certains toros du Sieur Moïse, hier, n’étant
pas forcément inscrits en haut des Tables de la Loi du « toro bien
fait », homogène, au trapio impressionnant mais harmonieux.
Certes on peut penser que le ruedo, « tout neuf », n’a
pas eu le temps de « se faire », surtout après quatre spectacles en
vingt-quatre heures, raison pour laquelle les toreros durent quitter les
zapatillas. Les toros, eux, ne pouvaient « lâcher » leurs sabots… on
aurait crié encore plus !
Ensuite, les toros « como los melones son… » Et cette
année, que voulez vous, il n’y a pas qu’à Mont de Marsan… que les melons
ne sont pas bons !
Mais, tous « les éleveurs de melons » vous le diront
aussi : « Peuchère, on ne sait pas ! Une année « ils y sont ! », et
l’année suivante « Ils n’y sont pas ! » Va t’en savoir ! »
En attendant, Mont de Marsan et ses fidèles attendent
toujours le grand triomphe…
C’est vrai monsieur Panisse… « Ca vous fend le cœur ! »
Mardi 24 Juillet – MONT DE MARSAN - 3ème
corrida de Feria – Plaza pleine – Grand beau revenu : Toros de Moises
Fraile (dont le sobrero premier bis, remplaçant le toro d’ouverture,
sorti « descordinado »), de présentation très inégale et de jeu
médiocre. Faiblesse et total manque de race furent les communs
dénominateurs d’une corrida à bien vite oublier. Pour le torero, le
premier fut le meilleur, malgré une grosse pointe de soseria, suivi du
troisième. Au rang du « sale bougre » dangereux, le cinquième. Pour le
reste, mansedumbre à la pique, faiblesse et soseria. En général, on
piqua peu et mal, même si les diestros mirent mieux en suerte. Aux
banderilles, on s’aperçoit dorénavant que dans chaque cuadrilla, les
« troisièmes » sont de plus en plus brillants. Que bueno !
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Juan Bautista : Une oreille et
Applaudissements, après un avis – S’est montré « grand torero », devant
son premier, tirant une faena que l’on devra revoir et décortiquer, dans
les peñas, au cours des longues soirées d’hiver. Dommage que ce toro
soit sorti premier, cueillant le public « à froid »…La même faena, au
quatrième, valait probablement deux « peludas » à son auteur. Faena
complète, brillante, excellemment bâtie, avec un début de toute beauté,
le torero « marchant vers le centre » en trois passes moelleusement
enchaînées et pecho « naturel ». Oubliés les sempiternels doblones. Les
séries qui suivirent allièrent autorité, intelligence et « naturel », là
aussi. Derechazos fluides, bien appuyés sur la jambe « de sortie », et
en fin de trasteo, deux grosses naturelles, longues et fluides, « que
l’on sentait venir ». Le toro « se rajo » et partit aux barrières.
Bautista y conclut sa faena, avec des adornos de classe et un pecho
majestueux, à la barrière. Là, il cadra et prépara soigneusement « un
recibir », porté en décomposant bien. Hélas, la lame ne fut que
« demie » et le triomphe « divisé par deux ».
Le quatrième, « feucho », moins présenté que le
cinquième novillo du matin, sortit « soson », sans transmettre… et il le
demeura. Jalabert se montra volontaire, tirant même une grosse série de
trois derechazos et pecho, qui fit bouger les aficionados.. mais hélas
il « catastropha » sa mort et entendit un avis, au lieu d’une grande
ovation, pour le moins. Actuacion « muy torera » de Juan Bautista, hier
à Mont de Marsan.
Sébastien Castella : Silence, après
avis et Ovation de consolation – Si l’on veut être méchant, on dira :
cinq pinchazos et trois descabellos à son premier ; et une lame quasi
entière, mais « très de côté » et « muy fea », au cinquième. Il est
indiscutable que le Français « vit un calvaire » actuellement, avec
l’épée (depuis la San Isidro). De même, on restera dubitatif sur la
faena « mécanique », froide, donnée à son premier, faible et soson. Par
contre, il faudra retenir ses vrais efforts et une quasi réussite à
faire charger le cinquième, un manso « remiso » qui chercha le coup dur
et la traîtrise, jusqu’au coup de puntilla final. Prenant des risques,
froidement, Castella parvint à tirer des muletazos « sueltos » de grande
valeur, et faillit bien même parvenir « à lier ». Hélas, le toro se
refusa, repartant vers sa médiocrité.
Mal servi, parfois « comme absent », assez
catastrophique à l’épée, Sébastien Castella « doit » un desquite à Mont
de Marsan… Peut-être jeudi. Il faut attendre…Le sitio reviendra.
Cesar Jimenez : Ovation et Division
après un avis – A été « en Cesar Jimenez » : Toujours calme, bien
coiffé, bien « étudié », mais au final, un peu répétitif et ennuyeux.
C’est peut-être ce que lui signifièrent les sifflets qui fusèrent au
sixième, un manso qui se transforma « en triste noblon » que le
madrilène voulu faire passer mille fois, au coup par coup, sans espoir
de succès. De plus, il tua « muy requetemal ! ».
Il avait mal tué le troisième, également, d’une
atravesada transperçante, mais au moins, sa faena avait bien accroché le
public, d’autant que ponctuée d’un formidable moment de musique taurine
et d’un solo de trompette qui à ce jour, restent le plus beau triomphe
de toute la feria. Jimenez, à son habitude, débuta «les deux genoux en
terre, plein centre », et tira quatre derechazos « de aupa ». Ensuite,
la « fluidité » alla décroissant, à partir de mi trasteo. Pourtant,
l’élégance un peu « empesée » et la belle musique faisant bon ménage,
l’illusion fut parfaite. Mais, malgré la présence à ses côtés de
Joselito, Cesar Jimenez… reste Cesar Jimenez, un éternel « Oui,
mais ! ».
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