Reseña du 15 Août 2006

 

 

DAX : « EAU, RAGE ET… DES ESPOIRS ! »
Grande corrida de Bañuelos
Enorme triomphe de Juan Bautista
Très digne prestation de Julien Lescarret.

     16 Août : On a beau ne pas avoir peur de l’orage, on ne put s’empêcher de sursauter lorsqu’un éclair fulgurant déchira le ciel, juste au dessus de la plaza, tandis qu’instantanément le terrible vacarme d’un coup de tonnerre secouait sèchement tout le monde, au plus profond des tripes. Les lumières, allumées dès le paseo, « claquèrent » aussitôt. Boudi!!!
     A peine remis de ce premier coup « de cymbale » et de leur émotion, les spectateurs de cette quatrième corrida de la feria de Dax « en prirent un autre », aussi violent, aussi assourdissant, et l’on commença à craindre une petite catastrophe. Le ciel, noir de suie, roulait de grosses menaces et tout à coup, déversa toutes sa rage en une averse « bien épaisse » qui noya les gradins et mit le ruedo en piteux état. Cela dura cinq minutes peut-être, chacun étant trop occupé à se protéger pour penser à regarder sa montre. Trop occupé également à suivre ce qui se passait dans le ruedo.
     Fundi avait donné une vuelta, au premier de la tarde, et Juan Bautista était en train de monter « un faenon ». Et nous, pauvres de nous, n’avions pas assez de mains pour protéger les appareils photo ou applaudir à ce toreo « de dulce », face à un toraco imposant, mais lui aussi, « de dulce ». Tandis que l’eau pénétrait partout, les plus chanceux pouvaient tirer quelques clichés de cette « grosse faena » sous cette « grosse averse », mais la plupart enrageaient, maudissant le ciel qui leur jouait un bien vilain tour. Il n’y aura pas beaucoup de photos de cette grande faena de Juan Bautista, au premier Bañuelos de Dax. Que lastima !
     O rage ! Orage maudit !
     Trempés comme des soupes, les spectateurs restèrent à leur place, faisant un énorme triomphe au jeune Arlésien, transformé en « Torerazo universel ». Deux oreilles sans conteste pour cette faena qui confirme tous les soudains espoirs mis en Bautista, après un retour aux ruedos que d’aucun pensaient bien plus discret, moins ambitieux. En une semaine dont bien de figures aimeraient enregistrer le bilan, Juan Bautista vient de se hisser au niveau des plus grands, du moins pour ce qui est de « la qualité et la toreria ». Cela se confirma, devant le cinquième toro, en une faena plus longue, plus « travaillée », dont la deuxième mi-temps fut de belle qualité.
     Deux oreilles vinrent récompenser ce trasteo solide, copieux et varié, devant un grand toro. Deux oreilles un peu généreuses cependant, « forcées » par le hold up parfait, auparavant signé par le Fundi. Un hold up tout à fait pacifique et valeureux, où le Madrilène « arracha » deux oreilles à un président qui ne voulait guère plier. Mais la pression du public fut telle que la trop longue et « monocorde » faena du diestro de Fuenlabrada, il est vrai bien conclue à l’épée, fut récompensée de deux trophées qui ne s’imposaient guère. Du coup, « l’escalade » étant déclenchée, les deux oreilles au Fundi « impliquaient » deux autres trophées à Bautista. C’est ainsi ! Mais au fond…

     Ce qui importe, c’est l’espoir ! L’espoir de voir un nouveau torero français, aller « titiller » les Espagnols, et le faire « con clase ».
     L’important est de ne plus avoir à entendre : « Oui il torée bien.. mais « comme un Français » ! Avec Castella qui a signé un nouveau triomphe, à Bayonne, et peut désormais « tutoyer les plus grands », Juan Bautista peut actuellement entrer en n’importe quelle grande feria et en laisser plus d’un « acojonado » (que l’on traduira poliment par « Sur le cul ! » - Asi de claro !).
     De même, il faudra souligner un autre espoir, celui de voir un Julien Lescarret, très digne et extrêmement vaillant, en un mot « très torero », hier à Dax. Face à un lot compliqué et très « brute », l’Aquitain a montré une envie de tout moment, une fermeté « dans son style à lui », toujours un peu trop « movidito »… Pourtant, nul ne pourra nier « qu’il s’est envoyé » deux toracos dont le premier voulait lui faire très mal, et le second en aurait ennuyé plus d’un. Donc, « crédit ouvert » et bon coup de chapeau.
     Reste l’espoir majeur : « Il reste encore des toros ! »
     On sait bien que la vérité d’aujourd’hui peut « exploser » demain, et que les toros d’Août peuvent « ne pas être les mêmes » que ceux de Septembre. Toujours est il qu’Antonio Bañuelos et les Dacquois ont offert un vrai « corridon de toros », à tous les aficionados des terres taurines, qu'il soient Toristas, Toreristas ou à plus forte raison Toreistas…
     Tous y ont trouvé leur compte et tous ont été boire ensemble, un jaune ou un rosé, à la sortie… eux qui avait bu tant d’eau, pendant la course.
     Corrida « majeure », au plan « trapio » et « pitones ». Ce que l’on appelle « una Señora corrida » ! Brave, que l’on aurait peut-être souhaitée plus puissante, à la pique. Noble, que l’on aurait aimé « avec un peu plus de piquant », à la muleta. Mais vous le savez bien… on n’est jamais content !
     Une vraie grande corrida de toros, qui a tenu debout et chargé, chargé, chargé… Avouez que c’est tellement rare ! Le public d’ailleurs ne s’y est pas trompé, qui a fait grande ovation au ganadero et à son mayoral, à la fin de la cinquième lidia, et lors d’une sortie a hombros bien méritée.
     Pour l’anecdote, on signalera que Juan Bautista est sorti de la sorte, par la grande porte, et que ses compagnons se sont chargés de le porter ainsi… jusqu’à l’hôtel. Certes, il manquait « la foule », mais le souvenir restera gravé dans les mémoires de ceux qui rencontrèrent cet équipage portant un jeune homme vêtu de rose et or, rayonnant de bonheur. Il est vrai qu’on l’aurait été à moins.
     De l’eau, il y en eu ! Des espoirs aussi ! Quant à la rage, allez… elle n’a duré que le temps... d’un éclair.

     15 Août – DAX – 4ème corrida de Feria – Plaza pleine – Gros orage au deuxième toro et temps menaçant, par la suite. Piste en bourbier, mais praticable : Six toros, magnifiques de trapio et d’armure, d'Aantonio Bañuelos (Ceux que l’on appelle « les toros du froid », de Burgos). Des toros qui firent de magnifiques sorties, recevant de justes ovations. Des toros qui eurent de la mobilité, en tous moments, et ne fléchirent « qu’incidemment ». Des toros braves et nobles même si chacune de ces qualités manqua d’un peu plus « de piment ». Trois toros « de faena », dont le lot de Bautista et le second du Fundi, mais deux bien plus ardus : Bronco et encasté, le troisième, que Lescarret laissa « cru » à la pique ; et complicadito le dernier, court et tête en haut. En résumé, un lot imposant et de grande qualité, qui justifia entièrement la salida a hombros du mayoral, après que le ganadero eût salué, à l’arrastre du cinquième.
     El Fundi : Vuelta, après pétition et Deux oreilles (en partie protestées) – S’est montré très torero, « dans son style », c'est-à-dire : torero macho ! Tout en force, en rudesse, en abondance. Il donna deux séries de bonnes naturelles au premier, qui détournèrent un moment les regards pointés vers le ciel. Le noble toro se retenait, à droite, et le trasteo fut irrégulier mais « enlevé » et musclé. Après pinchazo, l’épée tomba de côté, raison pour laquelle peut-être le président refusa t’il l’oreille. Fundi donna une vuelta rapide tandis que le ciel « noircissait » à vue d’œil.
     Lorsque sortit le quatrième, on avait éparpillé quelques grains de sciure devant le burladero des matadors. Du coup, Fundi alla « en face », où le sable restait encore praticable, et ne ménagea point sa peine : Capeo vibrant, banderilles valeureuses (en particulier la troisième paire) et longue faena, un peu répétitive mais non exempte de passages de grande qualité, en particulier sur plusieurs longues naturelles. Le toro, qui avait mis en danger le cheval, sur un batacazo « malin » n’a pas arrêté de charger, permettant au madrilène un final vibrant, scellé par un desplante où « il jette tout » et une bonne casi entera, bien portée. Le public demanda longuement l’oreille, cria, trépigna, forçant le président à concéder un deuxième trophée... qui ne s’imposait pas. Il y eut "division" à la fin de la vuelta.
     Juan Bautista : Deux oreilles (incontestables) et Deux oreilles (contestées) – A été tout simplement « grandiose » devant son premier adversaire, tandis que l’orage « explosait » sur la plaza. Peu importèrent les éclairs et les coups de boutoir du tonnerre. Peu importa la grosse douche, le vrai déluge : Dax a vu une actuacion « complétissime » avec cape, muleta et épée, devant un grand toro, idéal de noblesse. Un lujo ! Complètement décontracté, totalement « à son affaire », Bautista sidéra le public à la cape par de grandes véroniques et bonnes chicuelinas ; à la muleta, par des séries d’un temple, d’une lenteur, d’une douceur incroyables. On nous l’a changé! Le toro, noblissime, lui permit de  lier de grandes séries, limpias, nettes, « con gusto », bien rematées par le haut, en longs pechos, ou par le bas, en adornos de classe. Entrant fort et droit, Bautista coupa deux oreilles « de luxe », tandis que le public émergeait, sous un petit rayon de soleil bienvenu. Enorme succès, totalement mérité, et grande vuelta, dans la boue.
     Devant le cinquième, d’un « moteur » et d’une noblesse infinis, Bautista débuta sa faena à genoux, et alterna sur deux mains, des séries « plus travaillées », moins suaves et moins profondes que précédemment. Pourtant, la faena prit de l’intensité en sa deuxième moitié, en particulier lorsque le Français jeta l’épée pour se mettre à toréer sur main gauche, de face, tirant trois grosses naturelles et clôturant par des bernaldinas « sans épée », qui firent passer la plaza au rouge vif. Tuant d’une lame entière, trasera, Juan Bautista vit son adversaire, compagnon de triomphe, s’en aller doucement vers la barrière, où le puntillero (ancien de Caballero) ne fut pas à la hauteur de tant de bravoure et de noblesse.
     Bautista cueillit deux oreilles en partie contestées, mais rallia tous les suffrages en invitant le mayoral à partager son tour d’honneur, sans oublier un gros abrazo au ganadero, discrètement présent au callejon.
     Julien Lescarret : Une oreille et Ovation – A fait preuve d’un beau culot devant le troisième de la tarde, un toro très vif, très dur, qui le menaça par deux fois, au capote, sur côté droit, et finit par lui mettre un achuchon, sur le remate. Le Français se plaindra d’un coup sous l’oreille gauche, mais n’en laissera rien voir tout au long de cette première lidia. Toro très violent, que l’on pouvait croire trop peu piqué. Pourtant, sur un ruedo des plus instables et marécageux, le jeune diestro fit preuve de grosse décision, vista, agilité et pundonor. Réussissant à régler cette charge désordonnée et âpre, Lescarret tira de bons muletazos, en particulier à gauche, rematant spectaculairement par le haut. Faena « de décision » et oreille méritée, après un pinchazo et une entière vaillante.
     Le sixième calculait plus ses charges, sans humilier, et malgré tous ses efforts, Lescarret n’arriva pas à construire un trasteo compact ni reposé. On aura pourtant apprécié la volonté de citer de loin, et d’aguanter un vrai costaud, bien pointu, qui n’offrit guère de facilités.
     Sortie a hombros de Juan Bautista, "jusqu'à l'hôtel", tandis que le Fundi se faisait un lio avec son porteur et descendait en marche, un peu énervé. Ce que l’on appellera : un torero « de caractère » !