Reseña du 13 Août 2005

 

 

DAX : EL FUNDI, « A L’ANCIENNE ». MECA… « A L’HABITUDE » !
Emouvante et grande corrida d’Escolar Gil
Blessure de Juan Jose Padilla

     14 Août : Que demande t’on à une corrida ? - Avant tout, de l’émotion, de la passion, quelque chose qui vous transporte, et vous change de votre quotidien…
     Tout aficionado « de verdad », trouvera toujours « un » moment d’émotion dans une corrida, même si elle est imbuvable. Ce peut être « un capotazo », une pique, une paire de banderilles… ou l’image furtive d’un homme qui livre d’un coup, ses peurs, ses doutes, et arrive d’un coup à les surmonter, sur « un muletazo », ou une série, courte, haletante, inespérée.
     Mais lorsqu’une arène toute entière hurle d’un coup, son admiration, sa peur, pour enfin libérer sa joie, on a la certitude que l’on a vécu un grand moment, et la corrida alors, est inattaquable.
     Hier, Dax et son public ont vécu ensemble un de ces moments privilégiés, une de ces corridas qui resteront gravées dans le mémoires, dont les multiples rebondissements ont tenu les spectateurs en haleine, tant les aficionados que les néophytes, grâce avant tout, aux toros de Don Jose Escolar Gil, et aux hommes qui les ont affrontés. Ensuite, c’est le destin qui a joué ! Le destin, aidé par le courage des hommes ! Leur courage, leur technique, leur talent et… leur sincérité.

     Hier, 13 août 2005, à 17h45, Juan Jose Padilla arrivait au patio, « explosant » de bonne humeur et dévorant la vie à pleines dents. Invité à signer le magnum de Moët et Chandon, qui sera mis aux enchères, en mars prochain, au profit d’un œuvre caritative, le Jerezano fit mine de se l’emporter, avec un tonitruant « Gracias ! Gracias ! », avant d’y apposer un autographe qui laissait bien peu de place aux autres toreros de la feria. Vêtu d’un « discret » costume orange et argent, Padilla plaisantait avec tous, avant d’écraser sur sa poitrine, son ami Fernandez Meca, qui arrivait à son tour, en un abrazo digne d’être gravé sur les murs de la grotte de Lascau. Gargantuesque, Padilla ! Et tellement humain. Pendant ce temps, à l’ombre du couloir, El Fundi était déjà dans son combat. Poli avec tous, mais le visage fermé et le regard fixe, « il savait » que ce jour il allait être grand.

     Hier, une heure après, El Fundi qui avait déjà frôlé la cornada, en glissant et roulant, sous les cornes de son premier adversaire, se retrouvait tout à coup seul… avec quatre toros à lidier. Juan Jose Padilla s’était fait prendre bêtement, en invitant Meca « à jouer al alimon », avec un toro pas assez ou mal piqué, et le Français avait subi deux méchantes volteretas, pour exactement… la même raison.
     Avec cette habitude de mettre les toros, quels qu’ils soient, « à longue distance » à la pique, histoire de se gagner quelques démagogiques bravos, on en perd la notion du châtiment, car c’est à la pique que le toro dit sa bravoure, sa codicia, sa fijeza, et non « dans le cent mètres » qui le sépare du picador, avant la rencontre. Mettre un toro « de loin », et le retirer presque aussitôt, peut satisfaire certains, mais ce n’est pas cela, un tercio de piques.
     Le Français, dont on ne niera pas les qualités professionnelles, a fait de cet exercice une habitude. Et cela marche, sur 95% des toros. Mais hier, le toro avait de la caste, de la force et savait ce qu’il cherchait. Et quand Padilla invita Meca à un quite par chicuelinas « al alimon », les deux toreros faisant passer le toro « entre les deux », il y eut trop de gestes, trop de facilité, et… trop peu de méfiance. Un toro est là… pour accrocher, et pour tuer, s’il le peut.
     Surpris par un départ en fusée, Padilla se fit prendre, par la cuisse gauche, et lorsqu’on le releva, le sang inondait déjà la toile orange largement fendue. Furieux autant qu’attristé, Padilla demanda pardon au public, et ne quitta la plaza qu’après un quite par navarras, histoire de dire au toro « Tu m’as blessé, mais je suis encore là ! » et avoir pris dans sa main, un peu de sable, en un dernier « Je vous aime bien ! Attendez moi, je reviendrai ! ». Et en ces deux gestes, Padilla nous a paru « grand », alors qu’il nous avait paru « si petit », à Bayonne, quelques jours plus tôt.

     Padilla évacué, nous restaient Fundi et Meca, en mano a mano. Il était presque 19h. Un quart d’heure plus tard, c’est d’un « Unico espada » dont il fallait parler.
     Après avoir brindé à « la nouvelle vague Française », Mehdi Savalli et Marco Leal, présents au callejon, Fernandez Meca débuta fort bien, tirant une série de droitières, asentada, bien tirée, liée à un grand pecho, insoupçonné. Ce fut « une série », une grande série. Puis, on retrouva « le Meca de siempre », plus distant, plus mouvant, plus électrique. Sincère… à sa façon.
     Sur une naturelle mal guidée, le toro ne manqua pas l’occasion, et la corne fila au ventre, ouvrant une large brèche en haut de la cuisse gauche… de la taleguilla. A vivre l’instant, tout le monde a cru à la grosse blessure : le torero était parti s’affaler sur l’estribo, et tous autour, multipliaient les gestes angoissés. Un gros coup, sans nul doute, mais pas de sang, pas de cornade apparente. Déjà Fundi regardait le toro en se disant que « après celui-là, quatre autres ! », mais Fernandez Meca, revint, faisant preuve d’un courage « ostentatoire », et le public redoubla ses bravos. Le reste de la faena fut « d’émotion » plus que de réelle qualité, et l’estocade…des plus défectueuses. Mais, comme le torero se fit poursuivre et méchamment bousculer, se retrouvant encore une fois moulu, roué de coups, mais indemne, l’ovation monta, accompagnée d’une incroyable pétition de deux oreilles, pour une faena qui n’avait pas existé, et une estocade, « en sortant pas devant »…
     Furieuse pétition à laquelle le président résista un moment, avant de céder, sous peine de se faire écharper. Nous, on veut bien ! Mais alors, soyez aussi généreux, soyez justes, en un mot… soyez bons aficionados, avec le Fundi, au toro suivant.

     Padilla blessé, Meca à l’infirmerie, dont on ne savait s’il reviendrait, El Fundi fut admirable, devant le troisième. Admirable de fermeté, de sincérité, de toreria devant un toro qui fit une sortie « monstrueuse ». Il fut « un vrai matador de vrais toros », en une actuacion qui fut la rencontre « de deux férocités », où le toreo « de tous les jours » n’est pas de mise. Pas de naturelles ou de derechazos, liés, en mettant la hanche, en prenant la pose, et en se recoiffant entre chaque passe. Là, chaque moment, chaque seconde fut un combat. Chacune des séries, courtes et risquées, fut haletante. Là, pas de toreo « conventionnel », mais du courage serein, face à un risque certain, de la technique, à l’ancienne, en lidiant, « sur les jambes », avec deux objectifs : « dominer », pour ne pas être mangé, et préparer à la mort. On était loin de Ponce ou du Morante, mais on assistait pourtant à une grande faena.
     Il y eut un bon pinchazo et une entière « à fond ». Et là… surprise et abomination : Dax qui avait exigé les deux oreilles pour Meca, « seulement par le sang non versé », fit la moue devant ce formidable moment d’un vrai torero, d’un vrai matador de vrais toros, et seuls quelques dizaines de mouchoirs demandèrent un trophée. Au respect du règlement, bien sûr, le président refusa, logiquement.
     Pas rancunier pour un euro, le Fundi donna vuelta… et le président essuya une courte bronca. Pourquoi ? Pour une oreille qu’il ne pouvait donner, puisque la majorité ne l’avait pas demandé. Moi j’en aurais mis deux !
     Trois toros restaient au corral ! Qu’allait il donc se passer ?

     Il y eut un moment de flottement.Un panneau annonça la sortie du toro suivant, puis un autre, portant autre nom, autre numéro, mais toujours le même fer : Escolar Gil. Un nom qui restera gravé dans l’histoire Dacquoise des ces dernières années. On les dit « frères des Victorino », et ils furent vraiment les « gros frangins », les durs, les tatoués. Pleins d’âpreté, de mobilité, aucun ne se livra franchement. Tous savaient que derrière le capote ou la muleta, il y avait un homme. Alors, « la lidia » prit toute son importance…
     Lidia « habituelle » d’un Fernandez Meca qui revint, cuisse strappée et regard chaviré. Il boita bas, au début et à la fin, mais « entre les deux »... bougea très bien. On piqua le quatrième « dans la paletilla », mais peu importe ! Le toro tomba beaucoup, mais remonta, à la muleta. Meca redevint « le Meca de toujours », forcé, arqué, multipliant les séries, à bout de bras, tirant le toro, sur deux passes, et « se le mettant dessus », à la troisième. Heureusement, les grands cris et les double pechos ont toujours leur public. Frôlant une nouvelle cogida, le Français coupera une oreille au sixième… Ah, ce Meca ! Qu’est ce qu’on l’aiiiiime !

     Et puis « la lidia », mesurée, millimétrée, remarquable, par le Fundi, au cinquième. Dax qui mesure son injustice, affichera enfin une vraie et juste « grandeur », en demandant un trophée, malgré trois descabellos. Il faut dire que le faena, « de menos a mas » avait été convaincante, et l’estocade « superio ! »
     Ainsi se termina, par une sortie à hombros conjointe des deux toreros et du ganadero, une corrida « mémorable », par l’émotion vécue, mais dont les résultats statistiques, hélas, furent faussés… exactement pour la même raison.
     Quoi qu’il se passe, dans la suite de la Feria, Dax 2005 a un triomphateur, un seul et un vrai : Pedro Prados « El Fundi », Matador de toros !   

     13 Août - DAX – 2ème corrida de Feria – Plaza pleine – Grand bleu : Toros de Jose Escolar Gil, très bien présentés, faisant des sorties spectaculaires (en particulier le troisième), rematant très durement aux burladeros. Il montrèrent grande mobilité, venant de loin aux piques, poussant autant que le permettaient des forces inégales. Pas de réelle bravoure, mais un devoir bien fait, et une faculté à « remonter », à la muleta, et répéter des charges dures, sans jamais oublier de chercher l’homme, sous la muleta. Des toros qui exigeaient de la fermeté, du savoir et « des jambes ». La corrida fut un ensemble de charges dures, drues, ardues, et les hommes qui les « aguantèrent » avec un bonheur inégal, sont tous à saluer bien bas.
     Le deuxième de la tarde, du nom de…

     NDR : A cet instant, écran noir, qui ne se ralluma plus – Texte perdu. Ce qui suit a été « rafistolé », deux jours après. Mais.. ce n’était pas la même chose.

     Le deuxième, du nom de « Pulsador » blessa Juan Jose Padilla et accrocha méchamment Fernandez Meca, par deux fois. Padilla reçut une cornade d’une vingtaine de centimètres à la cuisse gauche, heureusement peu grave. Fernandez Meca fut soigné à l’infirmerie, de coups multiples, sans cornada apparente. Il réapparut pour lidier le quatrième.
     El Fundi (Une oreille – Vuelta après pétition insuffisante – Une oreille) s’est comporté en immense torero, et en vrai matador de toros. Triomphe « à l’ancienne », de beaucoup inaperçu, incompris. Ce jour, El Fundi méritait bien une oreille de son premier (à cause du pinchazo) après une faena où il sut corriger les terribles dangers de la corne droite, par un parcours gaucher de grand mérite (avec bousculade incluse), puis il revint à droite, et finit de convaincre tout le monde, en une série de redondos, incroyable, insoupçonnable, dix minutes plus tôt. Faena de poder, de saber y de querer. Puissance, technique et grand courage.
     Plus important encore, bien plus important, le Fundi, devant le troisième, alors qu’à ce moment là, « il lui en restait trois, derrière ! ». Meca était à l’infirmerie, et nul ne pouvait dire s’il allait en sortir. Toro qui fit une sortie sensationnelle, ovationnée de tous. Fundi le reçut « en maestro », au capote : Tranquille, asentao, sûr de lui. Le toro fut vraiment « lidié », arrivant très compliqué, très violent, à la muleta. Toréant « à l’ancienne », c'est-à-dire « sur les jambes », Fundi plaça plusieurs séries courtes, intenses, d’un immense mérite, et termina de dominer l’animal par du toreo par devant, sans perdre la tête de l’animal, la « réglant », pour le moment ultime. Fundi, à ce toro-là, a été, « immense », mais bien peu de monde l’a vu, puisqu’après pinchazo et une entière méritoire, la pétition fut minime, et le président « ne put » accorder le moindre trophée. Dax, en deux toros, s’était trompée deux fois, et avait fait preuve d’une injustice dont elle n’est pas coutumière. Muy mal !
     Devant le cinquième, plus abordable, Fundi ne fut pas rancunier : Brindant à tous, il donna de grandes séries, dont certaines, très reposées, et tua  magnifiquement (estocade de la feria ?)  Une oreille, après hésitation du public… à cause de trois descabellos. Cette fois, Dax redevint « grande ».  Super, el Fundi, le seul triomphateur d’une grande corrida de toros.
     Stéphane Fernandez Meca (Deux oreilles – Ovation – Une oreille) a bénéficié de la cote d’amour justifiée par de grands moments en ce ruedo, au cours de sa longue carrière. De plus, les deux cogidas reçues ont grandement amplifié l’émotion du public, au point de lui apporter  un triomphe qui nous paraît « un tantinet » exagéré. Pour généreux qu’il soit, un public doit être juste. Et l’on ne pourra jamais dire que Dax fut à la fois juste avec Meca et le Fundi. Cependant, les faits sont là, et l’Histoire ne pourra se refaire.
     Meca montra « de l’entrain », plus que de la qualité en recevant son premier au capote. Le tiers de piques fut spectaculaire, mais trop peu efficace, vu la caste et la mobilité du toro. D’où « la fusée » sur la préparation du quite « al alimon », entre Padilla et le Français.
     Padilla évacué, Fernandez Meca alla brinder à Mehdi Savalli et Marco Leal, présents au callejon. Il prolongea ainsi l’ovation qui avait  précédé son entrée en lisse. Bien, Fernandez Meca, dans les deux premières séries, plus asentado, moins voûté que de coutume, tirant bien du toro, et se libérant pas de bons pechos. Il passa à gauche, et les choses se compliquèrent.
     Sur un site à la naturelle, le toro fuse et le prend de plein fouet. La taleguilla déchirée en haut de la cuisse gauche, Meca file aux barrières où tout le monde vient à son secours. Moments intenses où le public entier est inquiet, croyant à la grosse blessure.
     Après un long moment, le torero revient, « maltrecho », fait passer le toro, au milieu de l’émotion générale, et le tue, très mal, en sortant par devant. Le toro, non dominé, non détourné par la muleta, revient sur le matador, le poursuit et le rattrape, tragiquement. Meca va s’écrouler contre la barrière, tandis que le public explose d’inquiétude.
     Est-ce pour cela que Dax demande, exige « deux oreilles » ? - Peut-être ! Toujours est il que Meca, complètement défait, roué de coups, et en rajoutant un petit peu, reçoit les deux trophées, va les faire porter à Padilla (en un geste un peu démagogue, puisque ce n’était pas « son » toro), et donne une vuelta d’enfer, en boitant bas. Il reviendra au quatrième, avec un courage que l’on doit saluer, et coupera du dernier, une oreille fort généreuse, saluant une faena « abondante », mais de piètre qualité, conclue d’une épée, efficace, bien que peu glorieuse (les photos, au moment de l’embroque, sont là pour le prouver). Cette faena fut brindée au Fundi, ce qui « en remit une petite couche » à l’émotion ambiante. Logique !
     Du quatrième, affreusement piqué (muy caido), et qui tomba beaucoup, on retiendra deux grandes paires de banderilles du Morenito de Arles, (lequel se montrera superbe, dans la brega du dernier). Meca débutera, en boitant ostensiblement, une faena « abondante », mais peu convaincante, bien mal conclue avec l’épée. Cependant, Dax n’avait d’yeux que pour « son héros », oubliant en cela… un « grand torero », ce jour : El Fundi.

     En fin de corrida, le Ganadero fut porté en triomphe, en compagnie des deux toreros qui sortirent par la grande porte. Nouvelle émotion ! Nouvelle joie dans les gradins. C’est le principal.
     Asi de grande es la Fiesta Brava !