Reseña du 21 juillet 2003

 

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MONT-DE-MARSAN : « L’AUTRE CADEAU » DE JULIAN LOPEZ .
     Extraordinaire actuacion du Juli, au Plumaçon.

     22 Juillet : On a déjà parlé du très beau geste qu’a eu le Juli en faisant don de tous ses émoluments de la Corrida de la Presse, à des ONG et des Associations à caractère Humanitaire, dont l’action soutenue par le Peña El Juli de Mont de Marsan.
     Ce jour-là, il toréa seul six toros, à Madrid, et fit du bien autour de lui. Pourtant, si tous saluèrent ce geste, bien peu se rappelleront de son actuacion, totalement faussée par une partie de Las Ventas, fermement décidée à « reventarlo », à le faire exploser.
     Cependant, un fait était là : le Juli s’était montré très torero… et très généreux. Mont de Marsan allait donc le recevoir, en théorie, avec d’autres yeux, un autre cœur… Il pouvait donc se permettre d’y venir, en grand seigneur, y boire quelque champagne, et « remercier aux remerciements », d’un air faussement modeste…
     Et c’est là que l’on peut parler de « l’autre cadeau »…
     Un cadeau, immense : Hier, 21 Juillet 2003, Julian Lopez « El Juli » a connu une extraordinaire journée, en plaza de Mont de Marsan, la plus grande peut-être, en France, depuis son alternative. Où que l’on aille, dans les archives, on a du mal a trouver une actuacion aussi complète, aussi torera, aussi profonde, aussi « sentida », qu’en ce lundi de la Madeleine.
     Certes, le bilan comptable de deux oreilles peut tromper le lecteur. De fait, c’est avec quatre oreilles et un rabo, que le Juli devait repartir vers d’autres plazas, la tête haute et le cœur fier. Deux pinchazos ne l’ont pas voulu, au premier, et le public ne pensa pas à réclamer le suprême trophée, au second. Que faut-il donc faire, pour couper les deux oreilles et la queue, à Mont de Marsan ? Cela dit, le public est roi…
     Quelqu’un m’a dit « On est pas à Dax, ici ! ». Bien piètre raison. Bien pâle argument… Pauvre aficion !
     Extraordinaire prestation d’un torero qui, toute la tarde, se montra totalement inspiré, y compris dans son placement et ses interventions, quand on banderillait les toros des copains, ou quand un bicho s’échappait de quelque capote. Il était toujours là, et détournait le danger, sobrement, facilement.
     Et puis, il y eut ses deux toros. Calme, très maestro, El Juli les étudia, au capote, les banderilla, avec puissance et variété, avant de « se lâcher », totalement, à la muleta. Au toreo fondamental, sur deux mains, auquel il donna une lenteur, une profondeur inusitées, il sut ajouter l’inspiration artistique, inventant sur le moment, des remates, des adornos, des fioritures qui furent à la fois, exploits techniques et formidables points d’orgue à deux faenas de très haut vol.
     Dans le callejon, on se regardait. Certains, qui le connaissaient pourtant à fond, avaient de la peine à le croire. « On ne l’a jamais vu comme cela, cette année ! » De son côté, le garçon « sortait » de chaque série, radieux, totalement transfiguré, comme heureusement surpris que fonctionne d’un coup, tout ce qui avait loupé, depuis Mars. El Juli était heureux, tout simplement. Et nous… doublement.
     Hélas, il perdit les deux trophées de son premier, à cause de l’épée. Pourtant, il faudra bien souligner qu’il attaqua trois fois, « à fond » et très droit. Oubliée, la petite tangente habituelle ! Au cinquième, l’épée fut du style « Bazooka », et le toro mit quelques secondes à s’écrouler. L’ovation fut immense, et les deux oreilles tombées d’un seul coup du palco paraissent bien chiches, à côté du moment de grand toreo, vécu durant dix interminables minutes.
     Que faut il donc, pour couper un rabo, à Mont de Marsan ? Cette faena était elle comparable, par exemple, aux deux trasteos de Padilla, l’an passé, chaque fois doublement récompensés ? Ni hablar ! Faena en tous points remarquable, estocade quasi parfaite. Emotion et joie… Deux oreilles et la queue !
     Aux côtés du Juli, Manolo Caballero fut un fonctionnaire besogneux que l’on a de plus en plus de mal à supporter. Le public le prit injustement à partie, parfois, mais il en va de sa totale responsabilité. Quant à Sebastien Castella, il parut auprès de son jeune maître, un futur virtuose qui doit encore revoir ses gammes… Asi las cosas !
     Bien sûr, on chipotera sur le trapio des toros de Chafik, les petits Santa Coloma de San Martin. Bueno ! Ils étaient « muy en Santa Coloma » mais, avec leurs « p’tites têtes et plumes grises », ils montrèrent plus de répertoire que les six monstres réunis de la veille, lorsque l’on parla de noblesse et de race. Cependant, à l’image du premier de Castella, il ne s’agissait pas de douce bêtise, mais bien de noblesse « enracée », qu’il fallait dompter, séduire, caresser… ce que réussit magistralement à faire Julian Lopez « El Juli ».

     Mont de Marsan peut  s’enorgueillir de la présence 2003 du Juli. Et elle peut s’enorgueillir « doublement ». Quant au torero, il est reparti vers d’autres ruedos. Cependant, on va suivre la suite. Il y a fort à parier que dans cette saison 2003, si difficile pour lui, il y aura eu « avant » et « après » Mont de Marsan…
     Hier, à Plumaçon, « El Juli estuvo hecho un torerazo ! » 

     21 Juillet – MONT DE MARSAN – 2ème corrida de Feria – Llenazo – Temps très agréable, gris bleu : En fin de paseo, le public et les cuadrillas respectèrent une vraie minute de silence, en mémoire de Miguel Mateo « Miguelin », décédé le matin.
       Six toros de San Martin, au trapio conforme à la souche naturelle Santa Coloma. Petits, rablés, cardenos pour la plupart, cornicortos pour certains, mais sérieux de présence et d’idées. Ils sortirent tous « comme de obus » et manifestèrent grande codicia au capote, bravoure « enracée », mais force limitée aux piques, pour ensuite charge avec noblesse aux diverses muletas, à condition que celles-ci veuillent bien en gommer quelques défauts.
     On peut penser que les deux du Juli furent les meilleurs. On peut également penser qu’il aurait transformé les six d’hier, « en petits chiens », y compris le gros sobrero, bien cornu mais faiblard d’Esteban Isidro, sorti quatrième, en remplacement d’un probablement bon toro qui se déboîta quelque chose lors d’une sortie « de formule un », bondissant de burladero en burladero, frappant fort, et sortant d’un choc, totalement « descorcdinado ». Una pena !
     Manolo Caballero (Division – Division) n’est pas bien, en ce moment, et sa cuadrilla, non plus. Cela va souvent de pair. Hier, ce grand peon qu’est Vicente Yesteras « murmura » deux paires de banderilles, « précautionneuses », et, s’emmêlant dans son capote, tomba sous les cornes du sobrero, à deux doigts d’une tragédie.
     Son maestro, Manolo Caballero, récita deux interminables trasteos, parfois agréables, souvent laborieux, rarement engagés, jamais profonds. La technique déroula de longues litanies main droite, main gauche, pechos et double pechos…
     Faena sosa, à un premier toro soso. Faena interminable, à un sobrero faiblard, qu’il mit en bas à plusieurs reprises, en toréant sec et « pa fuera ». Demi lame trasera au premier. Même topo, au quatrième, ratifié d’un descabello. A chaque fois, il voulut se convaincre qu’il avait été bien…
     El Juli (Immense ovation et grand salut, radieux – Deux oreilles) a eu une actuacion… radieuse. Raconter par le menu ses deux faenas serait un impossible challenge. Disons simplement : Poder, profondeur, inspiration, réussite… Tout s’est réuni pour que le Juli ait aujourd’hui, une actuacion sensationnelle. Le torero a mis 90% et le destin, les 10 restants.
     On aura du mal à traduire les muletazos interminables, les enchaînements moelleux, les remates qui suspendent le temps, tandis que tous les appareils photos déclenchent à la même seconde, et que chaque photographe sourit, en pensant : « On a tous la même ! » Plus ou moins nette ! plus ou moins exposée ! Une photo historique ! Et il y en eut beaucoup…
     Son premier , anovillado mais bien fait, chargea fort au capote, et le Juli se signala déjà par une grande demie. Après une grande mise en suerte et une bonne pique, mesurée, le quite par navarras. Des trois paires de banderilles, variées et volontaires, on gardera un grand por dentro, contre les barrières. A la muleta, le madrilène monta une première symphonie que l’on suivit avec respect et délice. Il y eut de olés qui tentèrent de durer autant que le muletazo, et des enchaînements qui ravirent les plus exigeants.  Hélas, voulant tuer « irréprochable » et atteindre le zénith, Juli pincha deux fois, très honnêtement, mit une demie qu’il pensait efficace. Alors qu’il aurait pu descabeller, il reprit l’épée pour un  dernier élan, définitif. Adieu les deux oreilles, mais formidable ovation pour le torero qui, triste mais radieux à la fois, salua, alors qu’il aurait pu donner vuelta. La faena le méritait bien.
     L’actuacion, devant le cinquième, « Olivero », N°102, marquera l’histoire du Plumaçon. Toro bas, qui sortit comme une torpille. Après une larga à genoux, le Juli l’étudia, au capote, et commença à lui dicter leçon. Après un châtiment court, trois paires de banderilles, très honorables, et ce fut « la » faena !
     Vous prenez tout ce qui a été écrit, précédemment, et vous multipliez par trois la sensation de profondeur, de lié, de suave, de langueur, et d’irréprochable esthétique. En un mot, un Faenon !
     Le garçon souriait aux anges, comme lui-même surpris que tout puise ainsi réussir, même l’impensable, même le plus fou, même le pecho à trois tours, sans que la corne ne touche un centimètre de muleta. Il y eut des trincherazos, des changements de mains, des remates inconnus… il y eut « la total maestria ! ».
     A l’épée, on fit silence. Le Juli mena le toro au centre, se cadra, et tout le monde poussa avec lui. Estocade entière, en montant sur la toro. Explosion de joie mutuelle. Grosse pétition, tandis que le toro est ovationné. Deux mouchoirs tombent d’un coup. Mont de Marsan semble s’en contenter. Curieux ! A la Mejico, c’était « tous les trophées ». Et Le Plumaçon, (con respeto !) n’est pas « la monumental de Mexico » ! Bon ! Cela ne fait rien !
     Grande vuelta et formidable triomphe « intérieur » du Juli. « Enhorabuenissima, torero ! »
     Sebastien Castella (Une oreille – Applaudissements, après un avis) avait lourde charge à passer derrière un tel triomphe. Il voulut jouer la maestria, également. Mais la réussite ne fut pas complète, loin s’en faut, et il y eut toujours quelque petit accroc, quelque pas en arrière, quelque hésitation, pour souligner à gros traits qui fut le maître, ce jour, et qui fut l’élève.
     Devant le troisième, le français fut propre, au capote, et très serré (trop), dans ses chicuelinas. Le toro avait un petit coup de tête incertain, sur côté droit, que Castella aguanta en sursautant, mais ne put ou ne voulut pas corriger, sur corne gauche. Après un début spectaculaire par double cambio dans le dos, au centre, Sebastien entama une longue quête de « la série complète », et n’y parvint que partiellement, tirant parfois de gros muletazos, soudain ralentis, très toreros. L’épée fut entière, mais avec quelque précaution, et l’oreille tomba, relativement normale.
     Le dernier, très bien fait, plus sérieux de tête, sortit comme un missile, et le Français donna une longue faena, en deux parties bien distinctes : La première, toute en classique, où il eut du mal a trouver distance et rythme. La seconde, baroque, totalement « ojediste », où il enchaîna d’incroyables muletazos, à deux pas des cornes. Toréo spectaculaire, un peu tarabiscoté que le public suivit, admiratif, mais sans pourtant s’émouvoir totalement. Hélas, l’épée piqua quatre fois, vilainement, et l’éventuel triomphe se termina par un avis… Cosas del toreo !

     Ce soir, présentation du Fandi, et gros challenge pour Antonio Ferrera, présent ici, depuis dimanche. A leur côté, Abellan tiendra lieu de joker. Pour point d’interrogation, les toros de Carriquiri.

Mardi 22 Juillet : Toros de Carriquiri, pour Antonio Ferrera, Miguel Abellan et El Fandi.