DAX :
LE « ROI PONCE », SUR SES TERRES !
15 Septembre : Définitivement, « historiquement »,
Enrique Ponce est le Roi de Dax.
Hier, quelques heures avant le paseo, nous vous
disions que « quelque chose » devait se passer, et que si
Enrique Ponce s’habillait de son nouveau « gris perla y oro »,
attention !
Quand il arriva au patio, ainsi vêtu, la cause
était entendue : Enrique Ponce venait, fermement décidé à
« laver l’affront » de la feria. Ce jour là, il avait été
obligé de "courir", devant un toro, et on l’avait sifflé,
pour cela, fort injustement.
Personne ne l’aurait accepté, et encore moins
Ponce, Prince de Dax, et surtout pas de ces princes… qu’on sort !
L’homme a du courage et de la superbe à
revendre. Ajoutez à cela, la technique, l’intelligence, un vrai talent
et un registre de suertes qu’on pourrait penser inépuisable, et vous
avez, si l’occasion s’en présente : Un faenon !
Hier, 14 Septembre 2003, Enrique Ponce, Prince de Dax, est définitivement
monté sur le trône de Roi, confirmant bien haut qu’il est le seul,
unique et magnifique "Numéro Un" du Toreo, au nez et à la
barbe de tous ces jeunes loups qui peuvent gigoter tant qu’ils veulent.
Ils ne lui arrivent pas à la rotule.
Hier, la corrida de Domecq est sortie noblona
mais faible, voulant être brave. Pour autant, pas scandaleuse.
Malgré tous ses efforts, le Juli n’a pu que
voir s’envoler le Roi Ponce, tandis qu’il devait batailler avec deux
« impossibles » et un dernier qui lui laissa faire de bonnes
choses, pieds joints. Le garçon a de la caste à revendre, mais ne put
jamais se hisser à la hauteur du Valenciano.
Maintenant et une autre fois, comme pour le Juli, à Mont de Marsan :
Pourquoi ne pas aller au bout de son plaisir et accorder les deux oreilles
et le rabo ?
Quand on assiste à une telle faena, et que sur
les bras, « la chair de poule envahit tous les poils déjà au garde
à vous », pourquoi ainsi bouder sa totale félicité?
Le toro n’était pas complet, ou semblait trop faible ?
Il ne fléchit pas beaucoup, à partir des roblesinas, et il me semble, il
y a peu (24 heures à peine), que Dax avait « surprimé » un
toro qui n’était pas complet, non plus. Digo yo!
Alors, pourquoi ne pas demander et obtenir le
rabo? L’estocade n’était pas entière ? Non, mais ce fut
une media lagartijera, très bien portée, et qui tua. Alors ?
Faenon d’Enrique Ponce ! Symphonie achevée ! Totale victoire
de « la brutale douceur ». Car, restons lucides : Toréer,
c’est conduire une charge toujours trop violente, d’un fauve, toujours
dangereux. Il aura beau être noble et « suave », un toro aura
toujours assez de force et de rage pour envoyer au ciel l’importun qui
lui cherche noise.
En face, Ponce ne va pas se laisser aller à de
douces rêveries. C’est un combat qu’il va livrer, et il sait ce
qu’il peut y perdre (on l’a vu d’un coup, l'an passé, en plaza de
Leon). Mais voilà, le torero est arrivé à un tel point d’excellence
que tout paraît facile, doux, comme « coulant de source »;
au point que dans cette dentelle, on en oublie tout danger.
La faena de Ponce, hier, en plaza de Dax est
historique, encore supérieure aux précédentes, par la variété et le
crescendo dans le mano a mano « Emotion – Perfection ».
Le toro lui-même semblait dire « Pas mal,
Enrique! Et maintenant, qu’est ce que tu me fais ? » Alors,
tandis que tout le monde écarquillait les yeux, tandis que les
photographes n’avaient plus de pellicule, tandis que la chair de poule
envahissait le callejon, le Roi Ponce inventait encore une nouvelle série,
supérieure à la précédente, qui était pourtant parfaite…
Extraordinaire Enrique Ponce !
Emouvante, cette vuelta al ruedo, et ce geste au
salut final, élégamment revanchard, comme disant « Alors, vous
avez compris ? Alors, vous savez bien que le jour du Samuel,
j’avais envie, mais que je ne pouvais pas. Vous m’avez fait très mal,
ce jour là, parce que je pensais que nous étions amis. Aujourd’hui,
nous faisons la paix. Mais, n’y revenez pas ! »
Alors, Dax, encore une fois, comme souvent dans
son histoire, est redevenue très grande : Debout, alors que le
diestro revenait au callejon, elle s’est mise à scander à l’unisson
un « Torero ! Torero ! » qui obligea le Roi Ponce à
revenir saluer, visiblement ému. Re chair de poule garantie ! L’émotion
du grandiose ! Une image et un bonheur partagé, qui sauvent la terne
saison dacquoise.
"Venus d’ailleurs", et très bien reçus à Dax, que ce soit
par l’ organisation, par les amis photographes, et par la gentille
petite Dacquoise qui, de la buvette, essaie de suivre les faenas, nous
sommes vraiment heureux pour Dax, car elle ne méritait pas ce qu’il lui
était arrivé, jusque-là. Hier, elle a retrouvé toute sa grandeur,
toute son ardente générosité aficionada, et enfin, toute sa chance.
Comme de plus, c’est Enrique Ponce qui lui a rendu tout cela… la vie
est vraiment belle !
Chapeau et Merci, Monsieur Ponce !
Enhorabuena, Juli ! Bravo, Dax !
14
Septembre – DAX – No Hay Billetes – Grand bleu : Six toros
de Juan Pedro Domecq, dont un de Parladé (même chose !), inégalement
présentés, allant du bas deuxième au grandullon jabonero troisième, très
haut ; Habillés de diverses capes (noirs, colorado, meloconton) et
correctement armés, la plupart de façon très diplomatique, mais
correctes et astifinas, pour la plupart.
Les toros firent de grosses sorties, courant un
peu distraits, rematant aux planches, venant bien aux capes, mais déclarant
rapidement une faiblesse qui allait se confirmer tout au long de l’après
midi, au point que le tiers de pique fut pure anecdote.
Noblesse générale, mais mansedumbre déclarée
chez le premier du Juli qui décida d’un coup que… « j’adore
les barrières en pin des Landes ! ».
Enrique Ponce eut le meilleur lot, même si son
deuxième lui joua le plus sale tour de la journée. Le Juli, quant à
lui, ne devra pas jouer au loto, cette semaine.
En début de tarde, comme un bis repetita de ce
qui s’était fait à Bayonne, on rendit hommage à Jean Marie Bourret,
applaudi par son maestro. Du coup, Jean Marie posa trois honorables paires
de banderilles, et, après ce qu’il a vu, au cinquième, devrait bien décider
de rempiler un an de plus, rien que pour le plaisir des yeux
Enrique Ponce (Une oreille, avec pétition
de la seconde – Grande ovation, de consolation – Deux oreilles, avec
timide pétition de rabo) a débuté en maestro, et a terminé en « artiste
grandiose ». Le Prince est devenu Roi !
Vêtu de gris perle et or, Enrique Ponce a
d’abord construit une grande tarde, puis, au cinquième s’est laissé
allé « à l’immense ». Première faena « a gusto »,
toréant classique, finissant dans une qualité crescendo, et tuant
d’une bonne demi épée. Le toro était faible, mais ne songea pas à
flancher. Oreille bien gagnée, et un murmure qui déjà, parcourt
l’assemblée « Ce Ponce, quand même ! »
Face à son « savonneux » deuxième,
haut, intéressant mais faible, Ponce va encore monter d’un cran
l’intensité artistique. La faena va grandir, jusqu’au moment où,
trahison ! le toro va faire une très lourde chute dont il se relèvera
bien tardivement, gâchant totalement la faena, et le plaisir. Enrique
reviendra pour trois muletazos de face, et un trincherazo, mais devra vite
conclure, dans la compréhension déçue de tous.
Puis sortit le cinquième : Déjà, la
grande symphonie débuta à la cape, où le Valenciano enchaîna de précieux
capotazos, conclus au centre par une demie de rêve, une rebolera et un
pecho, extraordinaires.
Pour mettre en suerte, un capotazo « en
rond », fixant le toro, comme un rejoneador le fait avec son cheval,
et une « demi » demi-véronique, d’une précieuse élégance.
A la muleta, que dire ? Comment raconter ?
Le toro va débuter faible, et Ponce va « marcher » en toréant,
vers le centre. Les deux premières séries seront classiques, sans trop
appuyer, comme pour convaincre le toro que « tu peux le faire ! ».
Puis, le torero « s’envole », et le toro de même : Un
pase de las flores et trois roblesinas, qui mettent le feu aux poudres. A
partir de cet instant, tout va s’enchaîner, et chaque épisode sera
plus parfait que le précédent. Dans une intensité émotionnelle
croissante, Enrique Ponce va enchaîner les suertes, le tres en uno, les
naturelles de face, les changements de mains, les remates, tous plus précieux
les uns que les autres. Tout à coup deux redondos, à double tour,
templadisimos, et les mêmes, mais à l’envers, le tout scellé d’un
immense double pecho. Oooooooooolé ! La plaza est emportée, et
certains, dans le callejon ont les larmes aux yeux.
La faena va se terminant, quand un olibrius, dans
le tendido, crie « aviso » (il avait raison, mais…) et
qu’au beau milieu d’une ultime série de doblones, mettant « artistiquement »
en place pour l’estocade, une première sonnerie éclata. (On l’eut préférée
moins forte, et en fin de la série. On pouvait bien attendre deux
secondes !) Le torero « se réveilla » de son rêve, et
partit fort pour un demi lame, très bien placée, qui tua le grand
partenaire, toro de combat devenu
ami.
Deux oreilles (insuffisantes, à notre avis) et
vuelta d’apothéose. En fin de l’ultime salut, Dax rappela Ponce, au
centre, aux son d’un émouvant et puissant « Torero ! Torero ! ».
Fabuleux !
El Juli (Silence – Silence – Une
oreille) joua de malchance, au sorteo. Il fit tous les efforts, multiplia
les tentatives, les suertes, mais… quand le toro ne veut pas !
Son premier décida, après une bonne série,
qu’il préférait se coller aux planches, rompant tout combat. Le Juli
faillit l’estoquer là, mais pincha beaucoup.
Le quatrième posait un problème : Si on
baissait la muleta, il allait « se répandre », et si l’on
restait « à mi hauteur », il devenait molesto, compliqué,
emm..bêtant ! Là, également, le Juli essaya, mai dut renoncer. A
son actif, une réception au capote, par six delantales, sans rompre
d’un orteil ; un quite par gaoneras, précédant une lourde chute
du bicho, et une épée, en entrant fort.
Après la grandiose faena de Ponce, le Juli
s’accrocha comme un mort de faim, face au dernier : Larga à
genoux, banderilles et début vibrant. Hélas, le toro baissa de rythme,
et l’on crut que tout était perdu. Mais le Juli a de la caste, et il
« remonta » sa faena, en toréant beaucoup « pieds
joints ». Ainsi, le muletazo est plus court, dérange moins le toro,
tout en restant spectaculaire et très torero. Juli rendit ainsi de la
force et de l’envie, au toro, mais ne put arriver à « la totale
plénitude ». Il entrera fort pour un pinchazo « très hondo »,
ratifié d’un descabello chanceux.
La messe était dite : « Bien petit !
Mais, un peu court ! Aujourd’hui, Ponce était… sur une autre
planète.
Le Roi Ponce avait regagné son trône. |