Reseña du 23 juillet 2002

 

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MONT-DE-MARSAN : JULIEN SAUVE LA TROISIEME
Une oreille et « le respect », pour Lescarret

     24 Juillet : Lorsque les clarines sonnaient la sortie du sixième toro, hier soir au Plumaçon, bien peu d’aficionados donnaient cher de l’avenir de Julien Lescarret. D’autres, en voyant le sobrero d’Andres Ramos, se rappelaient le triomphe, mais également la grosse suée du Juli, devant celui de Bayonne, il y a deux ans.
     Quelle ne fut pas la surprise de beaucoup, de voir Julien Lescarret « y aller franchement » et s’envoyer le morlaco, lui coupant une oreille, sauvant la corrida et surtout, se gagnant le respect général ? Carton plein !


     Cette fois, ça y est : Julien Lescarret est matador de toros ! Et l’Empresa de Mont de Marsan lui doit une fière chandelle. En effet, d’un côté, on avait du mal « à avaler » l’alternative d’Eauze. De l’autre, on renaudait sérieusement sur le lot de Charro Perez Tabernero qui rendait à tous la vie impossible, à l’occasion de cette troisième de la Madeleine.
     Un toro, par ailleurs magnifique, soufflant plus fort qu’un volcan qui sommeille ; Deux autres portant au corps « des bultos » suspects vestiges de quelque cornada, de quelque mal intérieur… cela faisait beaucoup pour un seul envoi, et d’aucun  pensait qu’on était en période de soldes, du côté de Salamanca. Dans les tendidos, on commençait à la trouver saumâtre, et quelque chanson peu flatteuse faisait son entrée dans le hit parade. Eduardo Davila Miura avait bien ouvert le bal, mais loupé sa conclusion, et depuis… une vraie Berezina, malgré les efforts de Miguel Abellan.
     Julien Lescarret était sorti vivant de la confrontation avec le « troisième bis », et même s’il avait beaucoup dansé devant la brute, on se disait « qu’on s’y attendait un peu », et qu’au fond, bien d’autres en auraient fait autant.
     Puis sortit ce sixième, un noiraud, bien planté, prêt à en découdre… Vaya tio ! On se dit qu’il va le manger tout cru, au Julien ! Et voilà qu’on reste abasourdi devant cette frêle silhouette qui se plante là, devant le bicho, et va lui tirer les meilleures naturelles de la feria, jusqu’à présent. Même le Juli, présent dans le callejon, opinait du chef ! Lescarret lui avait brindé le toro, et vraiment faisait honneur à son hommage.
     Certes, le toro ne fut pas entièrement dominé. Certes, l’épée partit un peu de travers. Certes ! Mais cela n’est rien à côté de la très bonne impression et le grande joie, causées par ce gamin qui paraît plus un gentil collégien qu’un terrible guerrier. Car, dans son apparente insouciance, Julien Lescarret en surprend plus d’un. Un revistero ami nous racontait que l’une des plus grandes préoccupations de Julien, à la veille de cette grosse corrida de Mont-de- Marsan était de savoir s’il pouvait encore avoir un place pour aller applaudir un de ses chanteurs préférés…à Dax. Un jeune d’aujourd’hui, qui semblait « jouer au toro », comme on joue aux caniques…
     Hier soir, Julien Lescarret devait avoir les épaules douloureuses de tant d’abrazos et accolades. Cet enthousiasme et ces félicitations, auxquels nous nous joignons, sont mérités. Tout fut loin d’être parfait, mais, depuis hier, vraiment, Julien Lescarret est « matador de toros ». Para mañana…Dios dira !

     23 Juillet – MONT-DE-MARSAN – 3ème de la Madeleine – Arènes pleines – Beau ciel et un peu de vent.
     Corrida très inégalement présentée de Jose Ignacio Charro Sanchez Tabernero. Des toros dont les armures fines esquivaient quelques insuffisances, du côté trapio, surtout chez les colorados. Cependant, cela n’avait rien de scandaleux, si ces toros avaient paru en bonne santé. On espère qu’il y aura examen post mortem et que le résultat en sera rendu public, car trois de bichos présentaient des symptômes de maladie ou blessures qui rendaient leur présence à Mont de Marsan, pour le moins douteuses. Le gros deuxième se mit à souffler comme une forge. Les trois et quatrième portaient au flanc des bultos, « des grosseurs » bien suspectes : Tuberculose, pour l’un ? Cornadas ou kystes  pour les autres ? Il serait utile de connaître la nature de ces handicaps qui ont gâché une partie de l’après midi. Côté positif : la grande qualité du premier, bien exploitée par Davila Miura, et l’allant furieux du sobrero d’Andres Ramos.
     Eduardo Davila Miura (Division, après deux avis – Palmas, après un avis) a été superbe muletero devant le très noble et très mobile premier. Ce toro était sorti au pas, sans aucune codicia au capote, puis s’était allumé au fer, s’échappant des capes pour aller percuter le picador de réserve, prenant un gros puyazo en secouant tout le monde. Au quite, Davila le laissa faire, constatant sa mobilité, et sa longue charge. Citant de loin, le sévillan dessina de longues séries de derechazos, superbement rematés par le haut en de grands pechos. Faena de maestro, digne du triomphateur de Séville : Calme, temple, lié, maestria. Muy torero ! Hélas ! Que paso? L’épée se refusa, à sept reprises, le diestro attaquant droit, semble t’il. Cette catastrophe à l’acier lui valut deux avis, au lieu d’une oreille, hautement acquise. Se souvenant du chic de la faena, plus du choc des sept pinchazos, la majorité applaudit, couvrant les quelques sifflets logiques, mais déplacés. Hubo mala suerte, de verdad !
     Par contre, on comprend mal l’entêtement et un petit air prétentieux avec lesquels il toréa longuement le quatrième, faible et souffrant de quelque mal caché. Certes, son obligation est de faire au mieux pour satisfaire le public. En l’occurrence, le public aurait probablement apprécié la brièveté et la pudeur…
     Miguel Abellan (Silence – Silence) ne put rien faire. Son premier était un gros burraco, sorti manso, qui se mit à souffler « caverneux », dès la sortie des piques. Transformé en marmolillo, le pauvre bicho, immobile et douloureux, faisait peine à voir… et à entendre. Après de vains essais, Abellan le bascula d’une bonne estocade, après pinchazo.
     Le cinquième était un flacucho cariavacado, qui alla percuter un burladero. Mansurron, sans caste, le toro alla par ci par là, prenant un quite par chicuelinas  et trois muletazos d’un Abellan dépité, condamné à prendre l’épée. Deux pinchazos, une entière et Amen. Malchance totale.
    Julien Lescarret (Palmas – Une oreille) vit rentrer au corral son premier adversaire, un roux qui portait au flanc deux grosseurs suspectes, et se transforma rapidement en invalide. Sortit alors celui qui devait « faire sixième » : Un tio, très sérieux et agressif, court dans le capote, la tête au ciel. Le premier tiers fut bouscula, Lescarret trébuchant sous le mufle, au moment de mettre en suerte. Bien Davila Miura, qui mit de l’ordre et plaça lui même le toro, en bon chef de lidia. Le deuxième tiers ne fut pas plus rassurant, le Morenito de Arles subissant un gros Waterloo. Pas rassurant, tout cela ! La première demi surprise, fut que Lescarret ne paniqua jamais. La seconde : Il resta longuement « en la cara dela toro », essayant de voir comment il pouvait faire passer ce manso, tardo, qui se met à marcher, pour soudain s’arrêter, le temps d’un lourd regard, bien sournois. Un toro qui aurait fait coincer bien des ténors. Lescarret « le busco las cosquillas », puis s’en défit en un pinchazo, une demie extrêmement tendue et trois descabellos.
     Le sobrero d’Andres Ramos était impressionnant : fin, très armé, agressif. Lescarret fit face et réussit à placer de bons delantales, avant de placer un quite aérien qui surprit le public. On se mettait à y croire, mais on ne pensait pas voir Lescarret aussi calme, aussi suelto, en un mot, aussi torero, devant pareil animal. Ayant brindé au Juli, Julien Lescarret exploita d’entrée la bonne corne gauche du toro de Ramos, en trois séries de naturelles dont certaines furent « vraiment bonnes ». Les meilleures de la feria, jusqu’ici : intenses, bien tirées, bien rematées. A droite, ce fut plus compliqué, mais le torero ne baissa jamais pavillon. Le toro fut il complètement dominé ? Non. Mais le français a été « en torero », calme et très vaillant. Un trois quarts de lame, un peu de travers, et un gros descabello, libérateur. Il n’en fallait pas moins pour que tombe, logiquement, une oreille, et que le sourire revienne sur tous les visages. Julien Lescarret venait de sauver la troisième corrida de Mont de Marsan, et ce n’est pas son moindre mérite.