Reseña du 14 août 2002 à Dax

 

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DAX : « FERRERA ET JULI… L’AMOUR VACHE ! »
Triomphes toreros, pour la première de Feria. Ferrera "a hombros"!

     15 Août : Visages et regards satisfaits, en fin de cette première dacquoise… On avait coupé des oreilles ; Un torero était sorti a hombros, un autre « à pied », mais très applaudi ; Et enfin, « le petit jeune », avait fait mieux que se défendre. Le ciel était bleu… Donc, la vie et les femmes sont toujours aussi belles…

     Pourtant, il s’en est passé, des choses, dans et hors de la piste… et de lourd nuages d’orage ont du survoler le callejon, en plusieurs occasions.
     C’était « les retrouvailles » d’Antonio Ferrera et du Juli, depuis l’incident de Badajoz. Déjà, au patio, la poignée de mains entre les deux diestros avait été glaciale, malgré la chaleur. Il semble que le Juli avait fait dire à Ferrera, avant la corrida, de ne pas lui offrir les banderilles. Le souvenir de Badajoz trottait encore dans son esprit. Ferrera, malin et un poil cynique, passa outre et se dirigea vers le mozo du Juli, lui demandant une paire des banderilles « perso », du madrilène. Regard effaré du mozo de espadas, genre « On lui a pourtant bien dit que… ». Ferrera, avec ostentation, va vers le Juli, et l’invite, sachant très bien qu’il va refuser, et que cela déclenchera les sifflets d’une bonne partie de la plaza, ignorante de l’incident de Badajoz… « extrêmement dur ! ».

     Ferrera savait qu’il mettrait un bain au Juli, banderilles en mains, ce qui s’est vérifié, par la suite… Le refus du Madrilène fut une motivation supplémentaire, et la première faena fut un tourbillon de passes dont certaines, soudain reposées, causèrent un gros impact, sur le public. Dax faillit déborder, et tuer sa Feria, certains réclamant, d’entrée, deux oreilles, hors de propos ! Ferrera, histoire d’en mettre « une de plus » dans les dents du Juli, se paya une deuxième vuelta, au petit trop. Dans le callejon, c’était d’un sinistre… « Vaya cara ! »
     Par contre… le triomphe d’Antonio Ferrera au quatrième ne souffre d’aucune contestation : Deux oreilles qui récompensent une actuacion étincelante… dans les « quatre tiers » : Capote, en intéressant, peu à peu, un toro abanto, sin fijeza, plus intéressé par la banderolle de Ricard que par les appels des toreros. Alli estuvo sensacional, Ferrera ! – Aux banderilles, en particulier avec une paire, citée « en marchant » - A la muleta, notamment dans des naturelles monumentales, incontestables – Enfin, avec l’épée, « atracandose de toro » ! (Et ça fait « quatre tiers » !). Grand triomphe su toreo sérieux, le secret étant qu’il n’a jamais douté, et donc « donné confiance au toro », le faisant « rompre a muy bueno ! »

     Cela fut bien plus rude, pour le Juli. Le public le regardait « comme çà ! », mi admiratif, mi méprisant… Le torero ne put contrer cette indifférence que par le sérieux et la sobre technique. Cela fut bien plus laborieux, plus terne, mais il y parvint presque, parvenant à couper deux oreilles au cinquième, rattrapant presque son adversaire d’un jour, qui, pour une fois, n’était pas forcément le toro.
     Loin de son rayonnement habituel, Juli piétina, cria, multiplia les efforts et jurant, crachant, pestant contre tous, contre tout… Mais il y parvint, et son estocade, même si elle n’eut pas d’effet immédiat, a valeur de « coup de canon ». Deux oreilles pour le Juli, mais… l’orgueil, la fierté torera, « la raza »…Il y a eu quelques sifflets, et « l’autre » a coupé trois oreilles… « hors de question que je sorte « a hombros » avec lui ! » Et le Juli s’en fut, très applaudi, mais un petit sourire triste au bord des yeux…

     Entre ces deux « monstres », Julien Lescarret faisait "petit collégien qui demande s’il peut jouer aussi…"  Eh bien, Lescarret a fait beaucoup mieux que se défendre, « buscando las cosquillas » à un premier qui en aurait asphyxié plus d’un, et réussissant de grandes choses au sixième, avec intelligence et toreria. Le toro venait de quinze mètres, noble, mais au pas… (Faisait penser au toro de Rincon, en 1993). Lescarret se planta, loin, aguanta sa charge mesurée, et donna de grzandes séries, parfaitement limpias et bien rematées. Helas, l’épée fut une croix, et son puntillero, un compagnon de calvaire… Deux avis, au lieu d’une grosse oreille, pour le moins. Bien pour Julien…

     Cela ne pouvait commencer mieux : Devant des toros, corrects de présence, mais par trop brochos, qui furent bien compliqués à lidier, trois toreros ont fait assaut de verguenza et de talent… que demander de plus ?

     14 Août – DAX – 1ère de Feria – Lleno – Grand bleu : Toros de la famille Flores : Tois de Don Samuel (1,2,6èmes) et trois de Doña Agustina (3,4,5ème). Présentation volumineuse, musculeuse, avec des armures très développées, mais par dedans. Muy brochos ! Demasiado brochos ! (Faut pas croire, il y en a aussi des « ouverts, et par en haut, desarollados y astifinos, chez Samuel Flores. A que si ?). Côté comportement, la corrida est sorti traditionnellement « abanta », trottant sin fijeza, dans tout le ruedo, s’arrêtant ici, repartant par là-bas, jetant un regard au callejon (comme le quatrième). Toros difficiles à toréer de capes, difficiles à fixer, sans grandes envolées de bravoure à la pique. Des premiers tiers « de tramite », où les toreros doivent faire « précis et ferme ». (A ce sujet, le Juli a un « confianza » dont le volume des rouflaquettes est inversement proportionnel à la capacité lidiadora et à un minimum de verguenza profesional ! Eso, que es ?)
     A la muleta, les toros ont fini par « rompre », à condition de mêler « confiance et fermeté », à condition de les convaincre et leur montrer le chemin… Ce fut patent chez les quatre et cinquièmes, même si ce dernier ne se laissa jamais aller, complètement. Le premier eut de bonnes arrancadas à droite ; le sixième vint de loin, avec noblesse extrême, mais sans étincelle. Côté « carnes » : le deuxième, soso éteint, et surtout, le trois, un gazapon violent, qui voulait tout manger.

     Antonio Ferrera (Oreille et pétition de la deuxième, avec deux vueltas – Deux oreilles) a débuté en « provocateur électrique ». Après le show aux banderilles, et le défi au Juli, Ferrera toréa le premier « à cent à l’heure », mêlant à des suertes rapides, enlevées, de soudains ralentissements du plus bel effet. Faena baroque, de torero « listo », capable de bien vendre à la fois « le précieux et la pacotille ». Faena bariolée, conclue d’une entière à fond, mais desprendida. Oreille méritée, mais supplément un peu exagéré…
     Par contre, nul ne pourra contester la capacité lidiadora, l’entrain et le talent torero d’Antonio Ferrera, face au quatrième. Un toro qui sort distrait, correton, fuyard, regardant au callejon, impossible à fixer… Ferrera alla le chercher au soleil et, par petites passes par devant, très compactes, très liées, lui donna confiance et presque « le goût de charger »… Aux banderilles, une première paire extra, démarrant en marchant, simplement, n’accélérant son élan qu’au moment de la réunion. Muy torero ! La deuxième fut plus spectaculaire, avec un passage à faux volontaire, où le torero faillit glisser. Pour finir, un bon quiebro, aux barrières. Explosion dans les tendidos. La faena fut aussi une explosion, de talent, de temple, de lenteur et de lié. Bon toro, définitivement convaincu, en totale confiance, que Ferrera va bien toréer, à droite, et « formidablement toréer », à gauche : longues naturelles, profondes, la muleta enveloppant, caressant  le mufle du toro… Secondes d’éternelle toreria. Superbe ! Ferrera « se saoule » de toreo, et les gradins exultent, à l’unisson. Entrant droit et fort, une estocade, définitive, et deux oreilles qui ne souffrent d’aucune contestation. Enhorabuena, Torero !

    El Juli (Silence – Deux oreilles, après un avis et quelques protestations) a passé une dure journée. Il le savait, d’entrée. Dur journée, et dur moment pour le Juli, qui paraît « atorado », enchaînant les corridas et les voyages, les défis et les duels… En plus, si le tirage au sort s’y met aussi !
     Hier, Juli toucha un premier qui erra un moment dans le ruedo, au pas, sans but. Puis, tout à coup, un arreon, d’un bout à l’autre de la plaza, ignorant les capotes, allant prendre un refilonazo  au picador qui ne lui demandait rien… Aux banderilles et à la muleta « amago », il fit semblant de charger, déclenchant puis marquant un imperceptible temps d’arrêt, avant de réattaquer brutalement. Mélange de soseria et de vice. Le juli essaya en vain de mettre un peu d’ordre dans ce fatras, et il s’y cassa les dents. Le public suivit avec dédain une triste conclusion, en épée très verticale.
     Le cinquième lui permit le rachat, aux trois quarts… Un toro « super brocho », qui mit un temps fou à rentrer dans le jeu, ne permettant aucune réplique à Ferrera, banderilles en main. Il y eut même une première paire… dans le sable. Juli était près de sombrer. Alors, le madrilène fit parler la race, et il partit « à l’assaut ». Ce fut laborieux, peu spectaculaire au début, le torero amoncelant les suertes sur les deux côtés, sans possibilités apparentes de succès. Derechazos et naturelles se succédaient, les passes se multipliaient, les unes « limpias », les autres, accrochées, et l’on pensait que la faena allait couler, doucement. Mais… voilà le talent, la force et la technique du Juli : Le toro, peu à peu, va mettre le tête, et suivre la muleta, presque sans à coups. Des derechazos « à facettes », hâchés, tressautés, du début, on passa à des suertes beaucoup plus longues et plus coulées. Le Juli avait réussi à fabriquer une charge à ce toro. Un exploit, ratifié par une immense entrée à matar, qui aurait mérité un toro « rodao »… Hélas, cela tarda un peu, et les gradins se refroidirent un tantinet. Deux oreilles que certains protestèrent, mais une faena difficile, « loin de la dentelle », qui permet au Juli de sortir avec tous les honneurs et grande fierté torera.

     Julien Lescarret (Division, après avis – Ovation, après avis) a été bien mieux que le stipule le bilan statistique. Son premier « n’arrêtait pas », et mettait grande pression sur le torero. Le jeune français ne se désunit jamais, et le harcela, plaçant ça et là quelques bonnes passes, sur le voyage. Hélas, la conclusion fut très laborieuse, le puntillero se chargeant de rajouter moult épisodes vainement descabellés, à deux entrées a matar, compromises. Avis et la colère de certains, tandis que la majorité applaudissait, en consolation.
     Par contre, Lescarret mit tout le monde d’accord, devant le sixième. Tout le monde, dans les gradins, mais surtout dans le callejon, où maints professionnels le félicitèrent et l’encouragèrent, reconnaissant la qualité de son travail. Ce sixième venait de très loin, noblement, mais lentement… Lescarret manifesta une grande intelligence, une grande vaillance, car il fallait aguanter, rester là, et un magnifique concept du toreo classique, esthétique, sans concession à la galerie. Sa faena fut un peu longue, peut-être, et le final fut moins net. Hélas, encore une fois, l’acier fut en crise, et les efforts, réduits en cendres. Peu importe ! On sait qu’il faut couper les oreilles, « marquer des buts », mais tout aussi important est « d’avoir été « bien ! », aux yeux de tous.
     A ce sujet, Dax aurait du permettre une vuelta au jeune torero. On le sait : « Qui aime bien, châtie bien ! ». Certains doivent vraiment « aimer beaucoup » Julien Lescarret. Alla ellos!  Palante, torero !