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BAYONNE :
QUAND DANSENT LES CHEVAUX
De Mendoza triomphe – Alvaro Montes séduit 4
Août : Quelle beauté ! La plaza est pratiquement pleine,
ensoleillée, peuplée « de blanc et rouge ». Dans la rue, le
bruit, la sueur, l’âcre odeur de la fête embrumée d’alcool… Dans
l’arène, la convivialité, le respect et la joie… Chapeau, Bayonne !
De l’autre côté de la piste, face au toril,
Pablo Hermoso attend la sortie de son toro, en caressant doucement les
oreilles de son cheval, comme pour lui dire « Allez, sois
tranquille, cela va bien se passer, et on va bien s’amuser, tous les
deux ». Commence alors un ballet magique, fait de galopades et de
feintes, de virevoltes et de coups de frein à main. Au centre de ce
tourbillon, le toro est devenu complice, courant après le vent, regardant
voler les anges. Alors, le cheval se met à danser et le public hurle,
enthousiasmé. Là-haut, comme Dieu dans son paradis, Pablo Hermoso de
Mendoza le prend à témoin : « Je vous avais bien dit
qu’on allait s’amuser ! ». Quatre oreilles et une queue, et
partout la joyeuse admiration.
Dans le callejon, un jeune homme le regarde, perdu dans ses pensées. Lui
aussi a chevauché comme un ange. Egalement, il a fait danser son cheval,
et a joué du violon… Loin d’avoir les facilités et la formidable
« cuadra » du navarrais, il a pourtant donné le moment le
plus intense de la tarde, au sixième : Un « violin »
avec une courte, suivi d’un desplante, penché vers le toro, caressant
son frontal, des deux mains. Pourtant, le sort n’a pas voulu… Un sort
qui s’acharne et assombrit son regard : Le cheval sauteur de l’an
dernier, qui est parti vers d’autres pâturages… Cette tendinite à
l’épaule droite, qui lui gâche la vie, depuis des mois, et l’empêche
d’appuyer, au moment de la mort… Et ce maudit descabello qui ne veut
pas faire son office de rapidité… Maldita sea !
Dans le callejon, le jeune homme regarde le collègue
triomphant. On sent presque ses larmes ! On en pleurerait avec lui !
Alvaro Montes a perdu quatre oreilles, à cause du descabello. Mais les
ovations du public tout entier lui ont dit, doucement : « No
pasa nada ! Tu es « un grand », et on te reverra, ici,
avec un immense plaisir ! Continue, et à l’an prochain ! »
Pendant ce temps, un autre homme regarde le ciel bleu. L’an dernier, le
crépuscule était de feu, d’horreur. De l’odieux attentat, seuls deux
chevaux se sont sauvés, à jamais mutilés par la haine des hommes…
Aujourd’hui, la paix est retrouvée, peut-être, mais le cœur n’y est
plus. Malgré la gloire et la richesse, Luis Domecq
a perdu… la flamme.
Reste Bayonne, la blanche et rouge ! Reste Pablo, plus « hermoso »
que jamais ! Restent « les yeux des chevaux qui dansent »…
3
Août –BAYONNE – Corrida de Rejoneo des Fêtes – Casi lleno –
Grand beau et belle ambiance:
Six toros de Benitez Cubero et Maria Pallares,
imposants de poids, trapus et, en général, bons collaborateurs. Le
premier manifesta une grosse tendance aux barrière. Il y eut également
un petit manque de codicia, d’agressivité et de continuité, dans la
charge.
Luis Domecq fit preuve d’un grand
classicisme, calme et sans imagination. Les rejones et banderilles tombèrent,
bien ou moins bien, au cours de deux prestations qui suscitèrent murmures
et applaudissements de politesse. Il tua mal le premier, et attendit
lourdement la mort du quatrième, s’octroyant une rapide vuelta que le
public accueillit avec bonne éducation.
Pablo Hermoso de Mendoza « a tout
emporté »… Quatre oreilles, et la queue du cinquième. Peut-être
un peu excessive, cette dernière, plus due à une fausse manœuvre présidentielle
qu’à une réelle apothéose, qui vous transporte eu ciel. Peu importe !
Le cavalier navarrais a construit deux actuaciones « a mas »,
alliant la rigueur géométrique à l’indicible beauté d’une grande
inspiration artistique, en toute complicité avec ses chevaux. Ils n’ont
pas la géniale personnalité de « Cagancho », mais ils en
sont les dignes successeurs, et Bayonne leur a fait grande fête, en
particulier à « Batista », le cheval qui danse ; à
« Danubio » ou « Mariachi » ;à « Chicuelo »,
« Albaicin » ou « Monterrey »…
Ajoutons à cela une réelle faculté de
communication avec un public d’avance conquis, et une grande promptitude
à l’heure du rejon final… Pablo Hermoso de Mendoza est « différent ».
On retiendra un final de gros impact sur le public, au cinquième toro :
Le cheval qui danse, les virevoltes à tour complet, au mufle du toro et,
en point d’orgue, la pose des banderilles courtes, à deux mains. De
Mendoza triompha totalement, en toute justice, sortant a hombros avec en
main, « le Makila d’honneur » offert au vainqueur de la
journée par la Peña Campera.
Alvaro Montes n’a pas à rougir de ses
prestations. Elles ont séduit le public, et l’ont souvent mené au plus
haut degré de l’enthousiasme et de l’affection. Hélas, et cette
maudite tendinite persistante en est peut-être la cause, le jeune
cavalier fut catastrophique avec les armes tauricides, que ce soit le
rejon ou, surtout le descabello. Malgré sept coups de verduguillo, le
public lui demanda une vuelta, au troisième. Par contre, on perdit le
compte, au sixième, et là, les tendidos le grondèrent, comme on dispute
un enfant qui met des miettes partout sur la nappe. « Autant de
descabellos que de miettes », et un avis à la clef. Quel dommage…
mais quelle ovation, tandis que le jeune s’excusait, totalement désolé
de sa maladresse. Grand torero et grand public !
D’Alvaro Montes, on retiendra la réception de
son premier, à la garrocha, hélas un peu gâchée par le peu
d’agressivité du bicho. Et puis ces deux formidables banderilles
« al violin », qui levèrent les gradins. D’Alvaro Montes,
on retiendra surtout le moment de total enthousiasme de la tarde, au sixième :
Les deux banderilles courtes, au cordeau, et dans un moment de frénésie
artistique, la troisième courte, al violin », suivie d’un
desplante, le cavalier « lâchant tout », et posant ses deux
mais sur le frontal du toro. Y olé, Torero ! A l’année prochaine,
à tout prix !
Grands moments de Rejoneo, hier, à Bayonne ! Grands moments de
tauromachie, tout simplement et, dans les yeux, la plus grande joie…
tandis que dansent les chevaux !
Ce
4 Août, « la fête continue », avec une corrida d’Atanasio
Fernandez, pour Stéphane Fernandez Meca, Juan Jose Padilla et Antonio
Ferrera.
En plaza d’Hagetmau, première novillada de
Feria : Ganado de Adelaida Rodriguez, pour Emilio Laserna, qui
remplace Tejela, Manolo Escribano et Fernando Cruz. |