Reseña du 3 août 2002

 

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BAYONNE : QUAND DANSENT LES CHEVAUX
De Mendoza triomphe – Alvaro Montes séduit

     4 Août : Quelle beauté ! La plaza est pratiquement pleine, ensoleillée, peuplée « de blanc et rouge ». Dans la rue, le bruit, la sueur, l’âcre odeur de la fête embrumée d’alcool… Dans l’arène, la convivialité, le respect et la joie… Chapeau, Bayonne !
     De l’autre côté de la piste, face au toril, Pablo Hermoso attend la sortie de son toro, en caressant doucement les oreilles de son cheval, comme pour lui dire « Allez, sois tranquille, cela va bien se passer, et on va bien s’amuser, tous les deux ». Commence alors un ballet magique, fait de galopades et de feintes, de virevoltes et de coups de frein à main. Au centre de ce tourbillon, le toro est devenu complice, courant après le vent, regardant voler les anges. Alors, le cheval se met à danser et le public hurle, enthousiasmé. Là-haut, comme Dieu dans son paradis, Pablo Hermoso de Mendoza le prend à témoin : « Je vous avais bien dit qu’on allait s’amuser ! ». Quatre oreilles et une queue, et partout la joyeuse admiration.

     Dans le callejon, un jeune homme le regarde, perdu dans ses pensées. Lui aussi a chevauché comme un ange. Egalement, il a fait danser son cheval, et a joué du violon… Loin d’avoir les facilités et la formidable « cuadra » du navarrais, il a pourtant donné le moment le plus intense de la tarde, au sixième : Un « violin » avec une courte, suivi d’un desplante, penché vers le toro, caressant son frontal, des deux mains. Pourtant, le sort n’a pas voulu… Un sort qui s’acharne et assombrit son regard : Le cheval sauteur de l’an dernier, qui est parti vers d’autres pâturages… Cette tendinite à l’épaule droite, qui lui gâche la vie, depuis des mois, et l’empêche d’appuyer, au moment de la mort… Et ce maudit descabello qui ne veut pas faire son office de rapidité… Maldita sea !
     Dans le callejon, le jeune homme regarde le collègue triomphant. On sent presque ses larmes ! On en pleurerait avec lui ! Alvaro Montes a perdu quatre oreilles, à cause du descabello. Mais les ovations du public tout entier lui ont dit, doucement : « No pasa nada ! Tu es « un grand », et on te reverra, ici, avec un immense plaisir ! Continue, et à l’an prochain ! »

     Pendant ce temps, un autre homme regarde le ciel bleu. L’an dernier, le crépuscule était de feu, d’horreur. De l’odieux attentat, seuls deux chevaux se sont sauvés, à jamais mutilés par la haine des hommes… Aujourd’hui, la paix est retrouvée, peut-être, mais le cœur n’y est plus. Malgré la gloire et la richesse, Luis Domecq  a perdu… la flamme.

     Reste Bayonne, la blanche et rouge ! Reste Pablo, plus « hermoso » que jamais ! Restent « les yeux des chevaux qui dansent »…

    3 Août –BAYONNE – Corrida de Rejoneo des Fêtes – Casi lleno – Grand beau et belle ambiance:
     Six toros de Benitez Cubero et Maria Pallares, imposants de poids, trapus et, en général, bons collaborateurs. Le premier manifesta une grosse tendance aux barrière. Il y eut également un petit manque de codicia, d’agressivité et de continuité, dans la charge.
     Luis Domecq fit preuve d’un grand classicisme, calme et sans imagination. Les rejones et banderilles tombèrent, bien ou moins bien, au cours de deux prestations qui suscitèrent murmures et applaudissements de politesse. Il tua mal le premier, et attendit lourdement la mort du quatrième, s’octroyant une rapide vuelta que le public accueillit avec bonne éducation.
     Pablo Hermoso de Mendoza « a tout emporté »… Quatre oreilles, et la queue du cinquième. Peut-être un peu excessive, cette dernière, plus due à une fausse manœuvre présidentielle qu’à une réelle apothéose, qui vous transporte eu ciel. Peu importe ! Le cavalier navarrais a construit deux actuaciones « a mas », alliant la rigueur géométrique à l’indicible beauté d’une grande inspiration artistique, en toute complicité avec ses chevaux. Ils n’ont pas la géniale personnalité de « Cagancho », mais ils en sont les dignes successeurs, et Bayonne leur a fait grande fête, en particulier à « Batista », le cheval qui danse ; à « Danubio » ou « Mariachi » ;à « Chicuelo », « Albaicin » ou « Monterrey »…
     Ajoutons à cela une réelle faculté de communication avec un public d’avance conquis, et une grande promptitude à l’heure du rejon final… Pablo Hermoso de Mendoza est « différent ». On retiendra un final de gros impact sur le public, au cinquième toro : Le cheval qui danse, les virevoltes à tour complet, au mufle du toro et, en point d’orgue, la pose des banderilles courtes, à deux mains. De Mendoza triompha totalement, en toute justice, sortant a hombros avec en main, « le Makila d’honneur » offert au vainqueur de la journée par la Peña Campera.
     Alvaro Montes n’a pas à rougir de ses prestations. Elles ont séduit le public, et l’ont souvent mené au plus haut degré de l’enthousiasme et de l’affection. Hélas, et cette maudite tendinite persistante en est peut-être la cause, le jeune cavalier fut catastrophique avec les armes tauricides, que ce soit le rejon ou, surtout le descabello. Malgré sept coups de verduguillo, le public lui demanda une vuelta, au troisième. Par contre, on perdit le compte, au sixième, et là, les tendidos le grondèrent, comme on dispute un enfant qui met des miettes partout sur la nappe. « Autant de descabellos que de miettes », et un avis à la clef. Quel dommage… mais quelle ovation, tandis que le jeune s’excusait, totalement désolé de sa maladresse. Grand torero et grand public !
     D’Alvaro Montes, on retiendra la réception de son premier, à la garrocha, hélas un peu gâchée par le peu d’agressivité du bicho. Et puis ces deux formidables banderilles « al violin », qui levèrent les gradins. D’Alvaro Montes, on retiendra surtout le moment de total enthousiasme de la tarde, au sixième : Les deux banderilles courtes, au cordeau, et dans un moment de frénésie artistique, la troisième courte, al violin », suivie d’un desplante, le cavalier « lâchant tout », et posant ses deux mais sur le frontal du toro. Y olé, Torero ! A l’année prochaine, à tout prix !

     Grands moments de Rejoneo, hier, à Bayonne ! Grands moments de tauromachie, tout simplement et, dans les yeux, la plus grande joie… tandis que dansent les chevaux !

    Ce 4 Août, « la fête continue », avec une corrida d’Atanasio Fernandez, pour Stéphane Fernandez Meca, Juan Jose Padilla et Antonio Ferrera.
     En plaza d’Hagetmau, première novillada de Feria : Ganado de Adelaida Rodriguez, pour Emilio Laserna, qui remplace Tejela, Manolo Escribano et Fernando Cruz.